jul.jules.dada (14 avril 2014) disait:
Bonjour les skipasseurs,
Tout d'abord je me présente car c'est mon premier post sur le forum.
J'habite l'Est de la France, je suis un passionné de montagne, je pratique le ski de piste, le ski de rando, l’alpinisme, un peu, pas beaucoup mais passionnément, et je suis lecteur de skipass depuis plusieurs années.
J'ai un niveau à ski correct mais sans plus et certainement bien inférieur à celui de beaucoup d'entre vous, car je ne skie pas autant que je voudrai.
A la lecture de ce post je ne peux m’empêcher de réagir car le droit et les procédures judiciaires, il se trouve que c’est mon métier !
Je vais essayer de recentrer le débat, même si je ne prétend pas être exhaustif.
Il y a trois différents aspects dans ce dossier.
1. La légalité du prélèvement
2. La responsabilité
3. Le dédommagement
1.
Concernant le prélèvement il faut se référer à l’article 9 des CGL (Conditions Générales de Location).
Cet article 9 des CGL stipule que le loueur peut demander une caution (en fait un dépôt de garantie) :
"Le Magasin Loueur pourra en outre exiger une caution de la part du Client d'un montant égal au prix de vente public TTC du matériel loué. La caution sera laissée sous forme d'un chèque, d'une empreinte carte bancaire ou d'une pré-autorisation de prélèvement. La caution sera restituée au Client lors du retour du matériel loué, sauf dans le cas de dégradation dudit matériel, et ce dans les conditions précisées à l’article 12 des présentes. Le Magasin Loueur se réserve le droit d'exiger de la part du client la présentation de deux pièces d'identité avant l'acceptation d’un chèque en guise de caution.".
Notez que le loueur "peut" demander une caution, c'est à dire qu'il ne s'agit pas d'une obligation.
La première question est donc : en l'espèce l'a t-il fait ?
Y a t-il eu un contrat de constitution d’une caution signé lors de la remise des skis, la prise d'une emprunte de CB valant expressément constitution d'une caution, la remise d'un chèque ?
Xypher11 a écrit : « Bref, le responsable n'a rien voulu savoir et a débité 400 euros à mon collègue qui s'était porté caution de la fiche de réservation (et qui avait laissé sans le savoir son empreinte de carte bleue lorsqu'il avait réservé en ligne). »
Cette mention très imprécise ne permet pas de répondre à la question.
Deux options :
Soit une caution a été demandé pour la location du matériel, auquel cas le loueur a le droit de prélever la somme de 400 € (indépendamment de la question du bien fondé, que nous verrons dans le §2). Dans ce cas si le pote de Xypher11 veut récupérer son argent, il devra soit trouver un arrangement avec le loueur, soit lui faire un procès.
Soit ce n’est pas le cas et le prélèvement, qui a été effectué sans l'accord du détenteur du moyen de paiement, est illégal.
Celui-ci peut demander le remboursement de la somme indument prélevée, sur le fondement de l'article L 133-18 Code Monétaire et Financier :
"En cas d'opération de paiement non autorisée signalée par l'utilisateur dans les conditions prévues à l'article L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse immédiatement au payeur le montant de l'opération non autorisée et, le cas échéant, rétablit le compte débité dans l'état où il se serait trouvé si l'opération de paiement non autorisée n'avait pas eu lieu. ».
Cette solution est logique car en l’absence de caution le loueur se fait justice à lui même (ce qui est bien entendu interdit) en utilisant les références de la carte bancaire qu’il détenait pour une raison précise (le seul paiement du prix de la location) à d’autre fins (à savoir se dédommager), sans autorisation du titulaire.
Xypher11, il faut donc vérifier s’il y a eu une caution au moment de la location.
Soit ton collègue s’est porté caution, soit non, sachant que la réponse sera déterminante pour la suite.
Comme souvent en justice la question essentielle est de savoir qui devra supporter la charge de la procédure ?
Ton pote pour demander la restitution de sa caution que le loueur aurait légalement refusé de restituer, ou le loueur pour obtenir les 400 € qu’il réclame ?
2.
Concernant la responsabilité, la question est délicate.
Il faut effectivement se rapporter à l’article 12 des CGL.
Cet article stipule notamment que « Le Client s'engage à restituer le matériel loué propre et dans l'état où il se trouvait lorsqu'il en a pris possession, sauf dégradation due à l’usure normale ou à un vice caché ou une usure non apparente ayant causé la dégradation, dès lors que la preuve desdits vices ou usure non apparente peut être apportée par le Client. »
Le postulat de départ est que le ski doit être rendu dans l’état dans lequel il était lors de la prise de possession.
L’aggravation de cet état ne peut être justifié que par la vétusté (une usure du matériel ayant pour origine un usage normal), un vice caché (défaut du ski dès l’origine) ou une usure non apparente ayant causé la dégradation (intéressant dans ce cas).
Si le ski était endommagé à l’origine, Xypher11 devra l’établir.
Des attestations de témoin des potes avec lesquels il est parti en vacances pourraient être des éléments de preuve valables (mais pas forcément suffisants).
Ces attestations devront préciser pourquoi aucune réserve n’a été émise lors de la réception du matériel (défaut peu apparent ou jugé peu important), bien que ce défaut ait été constaté.
Les copains devront attester uniquement de ce qu’il ont vu (ou pas), donc pas d’attestations de complaisances.
De son côté le shop a également des obligations :
Il devra démontrer que le ski a été rendu inutilisable et qu’il est économiquement irréparable, comme cela est mentionné dans cet article 12 :
« Il engage sa responsabilité pour une telle dégradation, laquelle donnera lieu au paiement, par le Client au Magasin Loueur, des frais de remise en état dudit matériel voire de remplacement de ce matériel, ce dans la limite maximale de la valeur de remplacement à l'état neuf au prix public de celui-ci, ce en sus du prix de la location. Dès lors que la réparation de ce matériel s’avèrera techniquement ou économiquement irréalisable, le matériel sera remplacé. Le client s’engage à payer ces frais à la restitution du matériel loué, le cas échéant par imputation sur la caution prévue à l’article 9 des présentes. Toute réparation est effectuée exclusivement par le Magasin Loueur. »
3.
Enfin se pose la question du dédommagement.
Le fait de facturer au client le prix d’un ski neuf prix grand public ne représente pas le coût d’achat du ski endommagé, mais bel et bien des dommages et intérêts dont le montant est fixé à l’avance dans un contrat.
On appelle cela une clause pénale.
Or le montant d’une clause pénale peut être réduite par un Juge sur le fondement de l’article 1152 du Code Civil.
Article 1152 du Code Civil : « Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite. »
Le pote de Xypher11 pourrait sur le fondement de ce texte demander au Juge la réduction de l’indemnité mise à sa charge par le contrat.
De plus il s'agit d'un montant maximum, seul la valeur de remplacement réelle étant susceptible d'être retenue :
"des frais de remise en état dudit matériel voire de remplacement de ce matériel, ce dans la limite maximale de la valeur de remplacement à l'état neuf au prix public de celui-ci".
Bon c’est une analyse rapide et sommaire (je me dégage de toute responsabilité et blablabla....) , qui à néanmoins le mérite d’explorer quelques pistes à approfondir.
Xypher11 on reste dans l’attente de tes précisions concernant l'existence d'une caution, ce qui sera déterminant pour la suite de cette affaire.
Cordialement
Bonjour, tout d'abord merci beaucoup pour tous ces éclaircissements.
"Y a t-il eu un contrat de constitution d’une caution signé lors de la remise des skis, la prise d'une emprunte de CB valant expressément constitution d'une caution, la remise d'un chèque ?"
==> Outre le bon de location sur lequel figuraient les références du matériel loué, nous n'avons rien signé de plus. En aucun cas nous n'avons signé, mon collègue ou moi, un contrat de constitution d'une caution.
Nous avons payé un acompte lors de notre réservation sur internet, puis à notre arrivée en boutique nous avons complété le reste de la somme due par la même CB utilisée pour le paiement en ligne (i.e celle de mon ami)
Comme souvent en justice la question essentielle est de savoir qui devra supporter la charge de la procédure ?
Ton pote pour demander la restitution de sa caution que le loueur aurait légalement refusé de restituer, ou le loueur pour obtenir les 400 € qu’il réclame ?
==> C'est justement une question que je me pose..
inscrit le 20/02/08
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