Fin janvier 2022 : skipass.com s'embarque pour un road-trip à la découverte des trésors des Hautes-Alpes. 8 destinations, 8 journées de tempête de ciel bleu en plein milieu de la saison la moins enneigée pour les Alpes du Sud depuis quelques décennies : c'est le jeu, personne ne contrôle la météo. Mais cela ne nous aura pas empêché de laisser vagabonder nos spatules sur les pistes évidemment mais aussi au delà, avec quelques belles surprises au passage. Nous sommes repartis avec des dizaines d'itinéraires dans la tête et autant de belles rencontres, des tourtons et de la bière locale plein le ventre, soit 4,83 fois plus de raisons que nécessaire pour remettre le cap au sud lorsque le truc blanc se décidera à retomber du ciel (ce qu'il fît évidemment une semaine après notre retour).
La route de Grenoble au Dévoluy donne le ton sur la beauté de ces paysages de montagne hautement distinctifs qui forment le massif éponyme. Le Dévoluy est aussi la dénomination du domaine skiable composé des stations de ski de Superdévoluy et de La Joue du Loup. Un nom qui dérive du verbe "dévaler" faisant référence aux pierres dégringolant dans les éboulis. En hiver, c’est la neige que l’on dévale sur 53 pistes desservies par 22 remontées mécaniques situées entre 1 450 et 2 500 mètres.
La découverte du domaine skiable s’effectue avec Thomas Michel, moniteur ESF (école dont il est l’ancien directeur technique), restaurateur l’été au col du Noyer, ancien élu de la commune nouvelle du Dévoluy, président de l'office de tourisme. Ce pur Dévoluard, au profil multi-casquette (à tel point qu'il nous accompagne en snowboard ce jour, ça fait plaisir!), a le terroir et le territoire chevillé au corps et à l'âme. Hiver, comme été, il chemine sur les routes de son « pays » des paysages bucoliques des zones de pâtures, verts ou blancs, en passant par les hautes falaises calcaires.
Sur notre première montée, le télésiège du Sommarel sifflote mais ce n'est malheureusement pas la "Seille", un vent rude arrivant du Haut Buëch annonciateur de neige. Pour notre visite, Le Dévoluy a confirmé sa réputation de grandes Alpes ensoleillées, où se marient sonorités du sud et hautes cimes. Thomas nous avait concocté un programme alléchant qui devait nous faire découvrir les hors-pistes de proximité comme le Bonnet rouge ou le Vallon la truie. Las, on reviendra un lendemain de vent de Seille. Emblématique, le mot Seille se retrouve d'ailleurs dans les toponymes des pistes et c'est par cette descente que nous rejoignons La Joue du Loup.
Pas de poudreuse lors de notre visite, mais des pistes entretenues aux petits oignons
Le domaine skiable affirme d'ailleurs fortement l'identité du Dévoluy sans ses dénominations : "Pierra, Dalles, Casses" pour qualifier l'étage alpin de la rocaille, "Berger, Clos, Draille" pour rappeler que les prairies d'altitude sont exploitées l'été par les éleveurs ovins, "Chourums, Selle" pour affirmer l'histoire géologique et calcaire du territoire. Les pistes sont naturelles jusque dans la géographie d'ailleurs mais un très gros travail de damage permet de skier dans des conditions optimales en conservant une neige de qualité.
Robert Mériaudeau écrivait dans la revue de géographie alpine que « le géographe résiste mal à l'attrait des reliefs dévoluards ». Géographe ou skieur, nul ne peut être insensible à ce massif bastion, en forme de fer à cheval, auréolé de merveilleuses crêtes rappelant les Dolomites. Les têtes de l'Obiou, du Grand Ferrand ou du Pic de Bure encadrent une vallée intérieure traversée des « paysages humains » d'une agriculture pastorale encore très présente et visible même en hiver. La position du domaine skiable en surplomb offre une terrasse privilégiée sur ce panorama grandiose qui se déploie aux arrivées des télésièges du Jas ou du Pélourenq.
En face de nous, le territoire des fameux Chourum.
Comme à chaque arrêt de notre périple haut-alpin, on croise des téléskis, au final plus authentiques que réellement difficiles!
Quand on demande à Thomas s'il y a une originalité sur le domaine skiable, il pense tout de suite au téléski du Serre-Lacroix qui possède un tracé singulier, composé de cinq virages sur le brin montant afin de suivre au mieux la ligne de crête sur laquelle il est implanté. Cette excentricité mécanique date du début des années 80 quand les deux domaines de Superdévoluy et de La Joue du Loup étaient constitués presque exclusivement de téléskis et évoluaient séparément et parallèlement, liées à des destinées communales différentes. Les téléskis s'appelaient alors les Plattes d'Agnières ou la Pierra d'Agnières pour montrer leur ancrage Asniérois. Serre-Lacroix reste le témoin biscornue d'une frontière inter-communale disparue avec la fusion des communes de Saint-Étienne et d'Agnières en Dévoluy.
Superdévoluy est intimement lié à son vaste ensemble à l'architecture cohérente établi sur un plateau, héritage du plan neige des années 60. Le Bois d'Aurouze est le bâtiment principal aux mensurations incroyables : 200 mètres de long, 1 083 studios, 14 niveaux. Ce lieu unique et emblématique a été labellisé patrimoine du XXème siècle. Au pied de la résidence, un front de neige en continu pour le plaisir des skieurs, « la plus grande grenouillère de France » nous précise Thomas.
Nous étions venus chercher de la neige fraiche pour apprivoiser les à-côtés du domaine. C'est finalement une sympathique balade que nous a proposé Thomas à la découverte de l'identité architecturale, paysagère et touristique du Dévoluy. Un parcours sur les skis plaisant dans le sillage d'un guide intarissable sur l'histoire, le présent et l'avenir de cette station singulière.
Aucune station ne saurait se dévoiler complètement en un jour. Notre "on reviendra pour" du jour est évident : le tout proche plateau de Bure et ses fameux radiotélescopes, "aisément" accessible (attention tout dépend des conditions évidemment) depuis le haut du domaine, et ouvrant de beaux itinéraires de ski sauvage, en plus de sa photogénique unique.
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