Rossignol Sender 110 : développer un ski freeride pour le haut niveau

Lorsqu'au printemps dernier, les équipes Rossignol nous convient à venir leur rendre une visite au sein de leurs locaux de Saint-Jean-de-Moirans , nous avons beau essayer d'en savoir plus quant au motif de cette invitation, nous ne récoltons que des retours évasifs, et des réponses faites de "venez donc, vous verrez". Puis, ne sachant que trop bien à qui ils avaient affaire les conversations se concluaient généralement par "Soyez bien à l'heure" . 
C'est donc armés de notre crayon et de notre curiosité la plus aiguisée que avons honoré cette invitation et franchi les portes de l'imposant bâtiment qui accueille siège du groupe et atelier de production. Et si nous espérions que l'accueil dissipe le mystère autour des raisons de notre invitation, les réponses laconiques et les sourires en coin récoltés dans le hall, nous font vite comprendre que la surprise sera préservée jusqu'au dernier moment. Nous emboîtons donc le pas de l'équipe Rossignol, et passons la porte de l'atelier.

Nous sommes conduits à travers les lignes de productions et les rangées de machines, pour certaines, bien plus vieilles que nous de plusieurs décennies, et rallions un côté du grand hall. Nous y sommes accueillis entre d'impressionnantes presses à ski et un établi dont nous ne pouvons pour l'instant distinguer ce qui le surmonte. Léa, responsable de la R&D skis alpins nous accueille : 

Le plan de travail nous est alors dévoilé : nous y découvrons noyaux, chants, fibres de verre, et autres composants en kit d'une future paire de ski ! Le projet de la matinée est révélé devant nous, il va s'agir, grâce aux bons conseils des équipes de prod, de presser notre propre ski. En laissant courir notre regard dans l'atelier, nous apercevons des feuilles de topsheet disposées non loin : félicitations, ce sera un Sender 110. On nous équipe d'un tablier, de gants, et nous voilà à l'oeuvre.

Le briefing dispensé par Léa, il est l'heure de démarrer la besogne : il faut tout d'abord enduire tous les éléments rassemblés (à l'exception des carres et de la semelle) d'une fine couche de colle : noyaux, chants, fibre de verre, titanal, tout doit y passer. Et comme il s'agit d'un bon gros 191cm, on fini par passer un peu de colle.  

Une fois les différents composants badigeonnés de colle, nous plaçons le fruit de notre labeur sur un chariot qui est conduit vers le moule qui permettra l'assemblage de toutes les strates du futur ski. Les carres et la semelle ont déjà été pré-installés (nous sentons bien que la confiance en nos compétences est toute relative), et nous poursuivons notre travail sous la conduite de Léa, toujours attentive. Nous empilons les composants selon l'ordre qu'elle nous dicte : nous plaçons tout d'abord les inserts en spatule et talon, puis les chants, une étape qui fera appel à toute notre dextérité. Nous enchaînons ensuite avec la mise en place de la fibre de verre, du noyau, des inserts titanal, et enfin des inserts caoutchouc conçus pour réduire les vibrations. 

Vient la dernière étape de cet assemblage minutieux : la pose du topsheet. Il s'agit de ne pas se rater après nous être montrés aussi appliqués pour agencer la partie non-visible du ski : il faut désormais que notre paire soit la plus belle de l'atelier. Après quelques minutes dédiées à l'emploi de toute notre application pour appliquer la sérigraphie, le ski est passé aux mains des maîtres des lieux qui le glissent ensuite dans les imposantes presses qui nous font face. Un peu de cuisson, et l'ensemble ressort rigidifié et assemblé, il faut désormais l'extraire du moule. Les skis peuvent ensuite partir à la finition, afin d'enlever les dernières touches de colle qui restent, affuter les carres, et préparer la semelle. Cette étape sera cependant confiée à des mains plus expertes que les nôtres en la matière, mais notre déception sera bien vite consolée, puisque nous apercevons quelques visages familiers qui circulent à travers les locaux Rossignol.

Un peu plus loin dans l'atelier, nous rencontrons Max Palm, Hugo Laugier, et Oscar Mandin en pleine visite de l'atelier en compagnie des jeunes de la Freeski Academy. Ils sont accompagnés de David Bouvier, directeur commercial, et d'André-Jean Kruajitch, responsable des tests, plus connu entre ces murs sous le nom de "Dédé". 

En tant que responsable des tests, Dédé collabore étroitement avec les athlètes, afin de se montrer à l'écoute de leurs demandes et ainsi développer de nouveaux skis qui correspondent à leurs attentes.

Le lancement du développement d'une nouvelle gamme débute généralement par une phase de test des skis de référence du moment, qui permet ensuite de définir un cahier des charges pour le futur ski. Les premiers prototypes sont développés, et mis sur neige par les équipes test : c'est le début d'un long processus, car il faut environ 35 protos pour arriver au bon résultat. Entre l'initiation du renouvellement de la gamme, et sa mise sur le marché, il s'écoule en général 2 ans, période durant laquelle les équipes testent tous les skis de la gamme afin de garantir sa cohérence.

Le fil conducteur à la mise au point des skis par les équipes de Dédé est la "recherche de plaisir", qu'il s'agisse de mettre au point un ski sérieux, ou un ski plus ludique. D'autre part l'une des volontés de Dédé au cours du développement de la gamme Sender, a été de remettre l'accent sur l'implication des riders, avec pour postulat que les attentes du public sont orientées par le top niveau.

Chez Rossignol, c'est entre autres Max Palm, 21 ans, étoile montante du Freeride World Tour qui prend part à la conduite du développement des gammes freeride côté athlètes. L'an dernier, il est entrée par la très grande porte sur le World Tour pour sa première participation, puisqu'il en a d'emblée marqué l'histoire en réalisant le premier double backflip de l'histoire de l'épreuve sur les pentes Baqueira Béret. Dès le début de la phase de test, Dédé et ses équipes font tester le ski à Max et aux riders du team freeride, qui donnent leur ressenti sur la version en cours, afin de s'assurer que le développement prenne une direction qui correspondent à leurs besoins.

Le département R&D s'attache ensuite à transférer aux nouvelles versions du ski les intentions exprimées lors des échanges entre riders et équipes tests. Même s'il s'agit de skis freeride, les protos sont avant tout mis à l'épreuve sur piste par les équipes tests, car c'est sur ce terrain que leurs caractéristiques se révèlent plus distinctement. Les essais se font toujours sur le même parcours, afin d'assurer la reproductibilité des conditions et de pouvoir disposer d'un comparatif cohérent : être testeur ski, c'est savoir se mettre dans la peau du hamster qui tourne dans sa roue.

Lors de la mise au point des premiers protos du Sender 110, Max ainsi qu'Oscar, également associé au développement, trouvaient que le ski était trop lourd. Côté développement, les besoins des athlètes ne sont pas interprétés d'un point de vue technique, mais en termes de ressenti. Afin de rendre le ski plus léger, les équipes n'ont pas cherché à faire la course aux grammes, mais à le rendre plus souple afin qu'il procure une sensation de fluidité et qu'il soit plus facile à manoeuvrer. 

Et n'allez pas craindre là que le Sender 110 ait été rendu trop docile : il s'agit en effet d'un ski qui a été pensé pour aller chercher les podiums sur les compétitions freeride, et qui soit au service des besoins des athlètes. Les premiers protos ont ainsi été emmenés sur les compétitions par Max et Oscar dès la phase de développement débutée. 

Les skis ont dans un premier temps été développés en 191, puis chaque taille a ensuite été mise au point individuellement : le Sender 110 existe ainsi dans une version en 184, ainsi qu'en 176. Il a également été pensé pour pouvoir être utilisé par les athlètes féminines Rossignol qui courent sur les compétitions freeride, et il n'y a pas eu de développement d'un shape féminin spécifique. 

Caractéristiques du ski :

• Pour le 191 : 134/111/141 - R22 - 4,6kg
• Pour le 184 : 133/110/140 - R20 - 4,4kg
• Pour le 176 : 133/110/140 - R19 - 4,1kg

L'une des grandes forces du groupe Rossignol est par ailleurs de disposer d'un site de production basé en France : il accueille en son sein la R&D, qui développe et met au point les futures gammes de ski, qu'elles soient freeride, piste, rando, fond, ou autre. Au sein de cet atelier, on trouve également le service course, qui prépare les paires des athlètes de la marque en fonction de leurs besoins respectifs. Chez Rossignol, les athlètes freeride disposent ainsi du même niveau de service que les athlètes course, un fait suffisamment exceptionnel au sein de cet univers pour pouvoir être souligné. Le site de Moirans sort chaque année environ 7000 paires de skis, tandis que le reste de la production est réalisé à Artès en Espagne, où sont fabriquées 600 000 paires par saison.

Afin de rester au plus proche des tendances actuelles et à venir en matière de freeride, Rossignol accompagne les jeunes pensionnaires de la Freeski Academy dans leur parcours. En effet, la structure et la marque sont partenaires depuis le lancement du programme Sender, ce qui permet aux jeunes d'essayer les skis avant éventuellement de pouvoir les acheter à des tarifs préférentiels permettant d'accompagner leur pratique.

La structure a été fondée en 2014 par deux anciens skieurs professionnels : Xavier Troubat et Laurent Niol. L'objectif fondateur était alors d'offrir aux jeunes un cadre d'entraînement dédié aux pratiques du freestyle et du freeride, tout en bénéficiant de l'accompagnement de coachs et d'anciens athlètes qui leur permettent de structurer leur pratique. Si au début la Freeski Academy comptait une quinzaine de pensionnaires, celle-ci compte désormais 150 jeunes riders, répartis sur les sites des Arcs, de Bozel, et de Val d'Isère. Ils disposent d'un suivi tout au long de l'année, réparti sur environ 130 séances de sport,. L'hiver, l'entraînement se déroule bien évidemment sur les skis, tandis que l'été les jeunes athlètes prennent le chemin de la salle de sport et du trampoline. Etre une graine de champion, c'est un investissement de tous les jours.

Pour Rossignol, ce partenariat permet d'entretenir une proximité avec les jeunes freeriders, et donne la possibilité à la marque de rester connectée au plus près de l'évolution des pratiques. De par le rythme des entraînements, les athlètes en herbe passent beaucoup de temps sur les skis, et mettent ainsi les produits Rossignol à rude épreuve. Le contenu de la formation évolue également, s'éloignant de l'alpin, et en intégrant davantage de freestyle pour répondre au mieux aux exigences des compétitions. Les codes du freeride actuels tendent vers une recherche de fluidité, sur des lignes où des sauts de barres de hauteur intermédiaires permettent de réaliser des trick. Cette évolution est notamment induite par les critères en place sur les contests freeride, qui valorisent désormais les lignes recherchant l'engagement et la réalisation de tricks dans la pente. L'enjeu pour Rossignol à travers ce partenariat avec la Freeski Academy est de pouvoir à continuer à proposer des skis qui soient en adéquation avec l'évolution des pratiques au plus haut niveau.

Et comme la vie est une fête, on vous annonce qu'une fière paire de Rossignol Sender 110 sérigraphiée du nom de votre site ski préféré sera à remporter cet hiver. Au risque de vous décevoir, ce ne sera pas celle qui a été assemblée par vos dévoués serviteurs, l'expression du manque de confiance des équipes Rossignol en nos talents a été parachevée lorsque des doutes ont été émis quant à la possibilité de skier avec la paire confectionnée par nos soins...

C'est donc une paire avec un design légèrement différent que celui que vous pouvez apercevoir ci-dessous, et réalisée par les équipes Rossignol en personne qui sera mise en jeu. Pour la "mécanique", on vous en dira davantage plus tard, mais on peut d'ors et déjà vous dire que cela se passera autour des skipass Live, quand il y aura de la poudre !

• Merci à Laurine, Lucas, Mathilda, et David du département marketing pour l'organisation de cette belle journée !
• Merci à André et à son équipe de tests pour les explications et l'accueille
• Merci à Léa de la R&D et aux équipes de production de nous avoir fait passer maîtres dans l'art de la réalisation d'un ski
• Merci à Max, Hugo et Oscar pour les échanges sur leur participation au processus de développement de la gamme Sender
• Et enfin, merci aux jeunes de la Freeski Academy pour la fraîcheur et l'énergie !