Cette article est la seconde partie de la chronique consacrée aux 11 jours passés au Japon en janvier 2018 à l'occasion du Freeride World Tour Hakuba. Si ce n'est pas fait, ne ratez pas le premier épisode, c'est mieux!
Il est alors évident que la course ne pourra avoir lieu au plus fort de la tempête. La seule fenêtre renvoie à vendredi ou samedi, soit les 2 derniers jours possibles.
Il faut donc bouger, essayer de produire quelque chose de différent que l'orgie à Hakuba qui est devenu sur ces pages un classique. Un classique certes sympathique mais un classique documenté en long en large et en travers également l'an passé.
Mardi soir, j'embarque avec moi Leo Slemett et Marion Haerty, 2 champions du Tour en titre (excusez du peu). 2 heures de voiture qui en deviendront 4, sur une autoroute balayée par la tempête, où les bourrasques nous forceront plusieurs nous à nous arrêter sur la voie. Direction la région de Myoko, où nous avons été invités par la station d'Arai Lotte, dont j'avais rencontré le responsable marketing quelques jours auparavant lors de la soirée d'ouverture du Freeride World Tour.
Arai avait été crée en 1993 par le fils ainé du co-créateur de Sony. Au sommet de la popularité du ski au Japon, elle accueillera jusqu'à 200 000 skieurs la saison 98/99.
Mais mal gérée, subissant de plein fouet la crise des sports d"hiver au Japon (le nombre de skieurs est passé de 18 millions en 1998 à 7 millions en 2015), la station, ruinée, fermait ses portes en 2006.
Totalement laissée à l'abandon (mais sans dégradations autres que les outrages du temps, c'est le Japon quand même), la station a été mise aux enchères par la région en 2015, rachetée par un groupe coréen (Lotte) puis rénovée et relancée cette année comme un immense resort de luxe dont le plus grand luxe reste à nos yeux d'offrir un superbe domaine alpin avec plusieurs bowls accessibles depuis les remontées au dessus des arbres et un dénivelé fort sympathique de près de 1000 mètres.
Les deux images ci-dessous datent de 2014 sont tirées d'un excellent article sur Abandoned Kansai que nous vous invitons à parcourir. La troisième date de notre visite en janvier 2018.
L'ambiance le soir est surréaliste, mélange de Shining et du Jour d'Après : impossible de se garer sur les parkings extérieurs enfouis sous la neige, il y a 40 cm de neige sur la route. ... Nous sommes seuls dans un immense restaurant haut de gamme, pour un des meilleurs repas du trip. Dans l'hôtel de plusieurs centaines de chambres, nous ne croisons pas un client. Pas plus au bar, à se demander si notre serveuse est bien réelle.
Le lendemain matin, je suis seul dans l'immense onsen. Je n'ose même pas profiter de la piscine intérieure : trop grande, trop calme, peur de réveiller les fantômes... Celle d'extérieur est pour sa part enfouie sous plusieurs mètres de neige.
Non mais j'vous jure d'habitude on m'attend pas, je comprend pas, ça doit être la faute du matos, ou d'un truc que j'ai bouffé hier
En l'espace de 3 jours, j'aurai dans cette chouette petite station de la vallée d'Hakuba une de mes pires journées de snowboard (hors accidents) et l'une des meilleures. Dans cet ordre.
La pire? c'était le mercredi, juste avant de prendre la route pour Arai. Trop de neige, oui vous avez bien lu et c'est la première fois que ça m'arrive en 40 ans (ouch ça fait mal).
Fatigue, board neuve trop courte, neige très profonde n'offrant aucune portance, mauvaise visibilité, pièges de terrains : difficile de se diriger, de trouver la vitesse nécessaire pour éviter les pièges et en sortir. La fatigue vient très vite, et c'est dans ces conditions qu'il y a un vrai risque d'accident... Seul dans la forêt, une chute tête en avant peu très très mal finir. Je le répète à chaque article sur le Japon, et ce n'est pas exagéré.
Résultat des petites erreurs de lecture de terrain sur ce premier run de la journée, je me retrouve à plusieurs reprises à passer 5 à 10 mn à ramper lamentablement comme un éléphant de mer pour m'extirper des pièges de la forêt. Le moindre mouvement de terrain peut cacher la mega congère qui stoppe net.
Sur un run, ça finit par faire beaucoup de temps et de sueur. Au final, les camarades de jeu (en ski) finissent par s'inquiéter. Fatigue, énervement, l'égo en prend quand même un sacré coup même si la vraie leçon reste l'authentique dangerosité de ce type de conditions au Japon. Le genre d'anecdote qu'on préfère taire en général mais qu'il est bon de partager.
Je me réfugie à la cafet, croise Travis Rice qui me dit que c'est super bon mais qu'il y en a beaucoup quand même... je plaisante et esquive.
Finalement je repartirai sur un dernier run avec Mr Bernard (tomber du cheval remonter, tout ça) : délesté du sac photo et fixs reculées à bloc ça va mieux, le run se mange d'une traite, pas totalement à l'aise non plus.
La meilleure? 2 jours plus tard, le manteau s'est tassé, il a bien évidemment copieusement neigé sans discontinuer depuis mais elle est porte, est rapide. Ben oui forcément, c'était la faute de la neige. Là, ça s'enchainera toute la journée, du pur bonheur en compagnie de quelques membres du staff du FWT et une bonne bouffe dans un resto à la déco improbable (et au garage encore plus improbable) pour finir.
Mais finalement, les dieux de la neige en décideront autrement : vendredi, le vent change encore d'orientation et souffle la face, faisant ressortir par endroits les icebergs du début de semaine. Guides et médecins estiment alors que les conditions de sécurité ne sont plus réunies. A 18h la décision tombe en meeting : la compétition est annulée.
Aussi triste que soit cet échec inaugural, il fait partie du jeu, et le Japon aura - au moins - deux nouvelles occasions de se présenter sous son meilleur jour : en effet Hakuba est au calendrier du FWT jusqu'en 2020.
Samedi matin, alors que tout le monde dort encore après la soirée de clôture, je charge le X-trail sous les éclaircies et quitte Hakuba sous le soleil. La météo avait vu juste, évitons de trop penser à l'occasion ratée.
Objectif : une dernière demi-journée et soirée à Tokyo avant mon vol retour le dimanche matin. Pour ce qui doit être mon 15ème passage dans la capitale nippone, le jeu photographique est d'essayer de sortir des images originales. Bon, mission pas complètement remplie : pour le cliché du coucher de soleil sur mégalopole avec Mont Fuji, je plaide coupable.
Le voyage se termine donc comme il a commencé. Sur ce voyage en demi-teinte coté ski et photos de ski, je décide que c'en est assez du Japon et que c'était ma dernière fois sur l'archipel. Trop de tempêtes, trop de neige.
Non, j'déconne. Ce pays est une drogue, et je n'ai aucune intention de me désintoxiquer. Japon je t'aime, à l'année prochaine.
de retour vers Munich pour l'ISPO, mon avion survole la Norvège... Lever de soleil sur les Lyngen (à moins que ce ne soit les Lofoten). C'est le petit bonus de fin de trip.
- le Freeride World Tour pour l'accueil cette semaine et la passion pure que chacun met dans l'organisation de ces compétitions.
- Vivre le Japon pour la voiture qui n'a pas, mais alors pas du tout peur de la neige. Et pour le Pocket Wifi qui me permet d'être connecté 24/24 en Wifi 4G partout, le truc qui a changé ma façon de voyager au Japon (Google Maps dans la voiture ça n'a pas de prix).
- Yasuda Tomoyuki à Arai Lotte
- Fujifilm, qui me fournit de chouettes outils photographiques pour essayer de faire de chouettes images. Toutes les photos de ce trip sont prises avec un X-T2, un X100F et les optiques qui vont bien.
5 Commentaires
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Superbes photos aussi ..
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