Big Mountain Pro 2008

Il y a là tous les ingrédients pour le contest de freeride ultime : une sélection des meilleurs skieurs et snowboarders freeride du monde (désolé, pas de filles), un terrain de jeu de la taille des Alpes, deux bus pour transporter tout le monde et chercher la meilleure neige, des hélicos et le carnet de chèques de deux gros sponsors, O'Neill et Swatch. C'est Phil Meier qui résume le concept de cette compétition.

Une compétition adaptée du surf, sans public, sur les meilleurs spots, explique l'organisateur, Nicolas Hale-Woods : "on s'inspire du surf, l'essence même de tous ces sports, où un jour l'ASP a dit : terminé de faire des galipettes dans les petites vagues de merde à Tokyo parce qu'il y a un marché là bas. On va à G-Land, on propose un évènement média et il n'y a que deux spectateurs sur la plage. Le but est proposer les meilleurs conditions aux riders. Le public donne une dimension intéressante, comme à Verbier ou Tignes, mais ce n'est pas absolument nécessaire".

Le résultat est une joyeuse caravane de 23 riders ("j'ai l'impression de rider avec des potes, pas d'être en compétition", commente Seb Michaud) qui promène Jeremy Jones, Seb Michaud, Phil Meier, Kaj Zackrisson (en photo), Flo Orley, Aurélien Ducroz, Xavier De Le Rue, Mich Tolderer (en photo en bas) et les autres...
C'est Kaj qui remporte cette étape du World Tour Freeride, juste avant Tignes ce samedi et Verbier, pour la seconde fois consécutive, et Jeremy Jones chez les snowboarders. Il nous livre ses impressions après le premier jour de compétition.

Au niveau du classement général, la bataille pour le podium est serrée entre le vétéran français Seb Michaud - presque 35 ans - et le suédois de dix ans son cadet, Henrik Windstedt, ancien freestyler. Henrik est en tête, talonné par Seb à quelques miettes de points. Aurélien Ducroz est en troisième place. Kaj, qui court en tant que remplaçant sur le Big Mountain Pro, ne marque pas de points au général. Vous allez me dire : "mais pourquoi une telle injustice ?" Ecoutons l'organisateur, Nicolas Hale-Woods, nous rappeler les règles d'engagement.

Lundi, les skieurs ont attaqué par une magnifique face, le Buet, derrière la Flégère à Chamonix. Une topographie tirée tout droit de l'Alaska avec de l'altitude (3000 m avec accès à pied après dépose en hélico), une inclinaison moyenne de 45° et un dénivelé de plus de 500 m. Le récit de cette première journée est ici.

Mardi, tout le monde embarque à 7h dans les bus, direction la Suisse, le Val de Bagne, pour la face du Rogneux (3000 m avec une déclivité frisant le 50°). Xavier De le Rue et Phil Meier étaient deux des riders peu convaincus par la qualité de la neige, Cody Townsend l'un de ceux qui, au contraire, voulaient envoyer la sauce. Ca discute beaucoup pour finalement prendre la décision de courir. Neige problématique, lignes moins évidente, dénivelé plus court : "nous avons été trop gâtés la veille !", résume Xavier.

Avec le Buet, ce seront les deux seuls runs de la compétition. Le reste de la semaine sera une chasse aux papillons infructueuse. D'abord en Italie, à la Saulz d'Oulx, à Sestrière (où une face de 1000 m de dénivelé n'avait pas la qualité de neige nécessaire à une compétition) puis aux Karellis, où la face repérée la veille se révélera impraticable le lendemain. Jumelles collées au visage, Drew Tabke donne son verdict : "la neige est censée être blanche. Là elle est marron et bleue. C'est le genre de neige où, en cas de chute, tu peux débarouler un bon moment". Le passage des guides dans la face confirme le mauvais feeling : la course est annulée.

Le jugement, à la Grave, se révélera tout aussi délicat. Trois juges (le quatrième étant le vote des riders eux-mêmes) décernent la couronne du vainqueur sur la base de deux runs, en fait véritablement celui de la face du Buet, le premier jour. Le jugement étant sur vidéo, chaque run était censé être filmé à l'identique, de la même caméra, avec la même valeur de plan, sans montage. Malheureusement, certains riders ont disparu hors de vue dans des couloirs, d'autres ont été ratés par la longue focale, et les juges se sont retrouvés avec des images montées, intégrant de la longue focale et de l'hélico. L'égalité n'était pas respectée et les dents ont grincé un peu.

Ce fut également difficile de départager des riders aussi talentueux que Jeremy Jones et Xavier De Le Rue, au coude à coude, ou Kaj Zackrisson et Aurélien Ducroz.
Au final, malgré les inévitables questions sur le jugement (quelle compétition jugée n'est jamais remise en cause ?) et la pauvreté des conditions de neige, nous avons assisté à une magnifique compétition sur la face du Buet et juste pour cela, ça valait le coup. Il faut aussi saluer les efforts des organisateurs au service de la cause freeride : ce World Tour a une exposition médiatique, des sponsors (qui ne sont pas l'épicier du coin) et un niveau de ride inégalés.
C'est l'organisateur, Nicolas Hale-Woods, qui tire les conclusions du Tour arrivé à la moitié de son parcours.

Texte et interviews : Guillaume Desmurs
Photos et images vidéo : Big Mountain Pro
Montage : Onno Bosch