Pentes raides au Pérou

Vous les passez comment vos vacances d'été ? Thomas Gautheron, 22 ans et Antoine Bletton, 23 ans, étudiants ingénieurs à Grenoble, ont choisi le soleil du sud avec pour objectif "d'escalader des sommets de plus de 6000 m dans la cordillère blanche au Pérou et redescendre à skis par des faces raides et esthétiques, en suivant les traces des pionniers de la pente raide". Une profession de foi ambitieuse pour ces amateurs éclairés qui réaliseront pas moins de huit sommets au total. Ils feront au passage mentir les spécialistes de la pente raide qui signent en général 3 à 4 pentes par voyage au Pérou, en raison des aléas climatiques. "Nous visions ces sommets : Pisco, Yanapaccha, Tocclaraju (ridé par Marco Siffredi en 99), Artesonraju et Quitaraju (ouvert par JM Boivin). Finalement le Tocclaraju était tout en glace, nous avons abandonné, de même que le Quitaraju, qui demande une semaine, de plus après avoir pris des renseigments, on a appris que la face glacée était couverte de neige sans cohésion très instable", explique Thomas Gautheron.
A leur retour, ils avaient rajouté quelques pages à leur carnet de course avec huit sommets : Vicos (5300 m), Pisco, Yanapaccha (dont la face ouest n'a jamais été skiée, selon leurs informations), Pastoruri, Urus (qu'ils ont redescendu à pied), Ishinca, Artesonraju et le Chopicalqui.

Tout a commencé sur d'autres pentes, celles des Aravis et du Mont-Blanc. Collocataires à Grenoble, ils se connaissent depuis cinq ans et depuis quatre taquinent ensemble les pentes raides des Aravis (face nord-est de Tardevant, couloir nord du Paré de Joux, Rampe Chauchefoin à la Blonnière) et du massif du Mont-Blanc (face nord-est des Courtes, couloir Gervasutti à la tour ronde, couloir Whymper à l?Aiguille Verte).

C'est à cette époque qu'ils sont impressionnés par les pionniers de la discipline (Patrick Vallençant, Jean-Marc Boivin, Marco Siffredi). "En lisant leurs livres (Ski extrême, L?abominable homme des glaces et La trace de l?ange), on s?est rendu compte qu?ils étaient tous allés en expé au Pérou dans la cordillère Blanche. C?est là que l?idée de notre expé s?est concrétisée : répéter leurs itinéraires de pentes raides".

Candidats sans trop y croire au Millet Expedition Project (MXP), ils terminent deuxièmes de la catégorie "performance", avec comme cadeau une aide matérielle, financière et des journées de formation. Un bon début ! Les dates sont fixées : 12 juin au 31 juillet, direction Huaraz, la grande ville de la cordillère Blanche.

L'acclimation a l'altitude fut l'affaire de randonnées d'altitude et de trois sommets : le Vicos, le Pisco 5 762 m (répétition de l?itinéraire de Jean-Marc Boivin) et la face ouest du Yanapaccha (5 460 m). "On s'est promené la première semaine, on allait dormir à 4 000 m car c'est la nuit que tu t'acclimates le mieux. On est allé dans la cordillière Noire (parallèle à la Blanche mais plus proche de la mer) pour avoir une vue panoramique et repérer nos sommets. A 4 200 m tu es en short !" Finalement ce n'est pas l'altitude qui posa problème, mais les boyaux avec la tourista.

Après un break sur trois ("petits") sommets, ils se sont attaqué aux gros morceaux, avec d'abord la face sud-est de l?Artesonraju, 6 025 m (répétition de l?itinéraire de Patrick Vallençant). "La descente intégrale de cette face de 600 m inclinée à 50° était notre principale motivation dans cette expédition. La face commence avec 60 m de rappel skis aux pieds dans une partie inskiable et puis du ski libre dans des passages à 55° soutenus sur une neige bien dure. Un bon souvenir, surtout une fois la rimaye passée ! C'est le sommet le plus dur qu'on a skié, même dans les Alpes."

L?arête sud-ouest du Chopicalqui 6 354 m était encore une répétition de Patrick Vallençant. "Cette belle arête effilée ne faisait pas partie de nos objectif initiaux mais remplaçait le Tocclaraju. On garde des super souvenirs de cette descente : 15 cm de peuf sur une bonne neige dure, descente intégrale (avec 8 mètres de rappel) depuis le sommet en gardant les skis aux pieds et un passage bien technique sur l?arrête avec du gaz de chaque côté et donc pas le droit à la chute ! Le "Chopi" était notre sommet le plus haut, c'était aussi la fin du trip, bien acclimatés on montait bien, dans une bonne neige".

Thomas nous parle de ses deux sommets préférés :

L'année prochaine, Antoine Bletton (à gauche) et Thomas Gautheron (à droite) ont prévu de réviser leurs partiels dans le Mont-blanc, en Suisse et, pour 2009, visent l'Himalaya (Pakistan, Tibet,?) avec le même programme : de la pente raide, des ascensions à pied, mais cette fois beaucoup plus haut.

Photos : Antoine Bletton et Thomas Gautheron
Texte : Antoine Bletton et Guillaume Desmurs

Partenaires : Millet Expedition Project (Millet, Julbo, Petzl, TV Mountain.com, Kairn.com, Cefar Compex, Polar, GMHM, France Bleu Pays de Savoie, Ifremmont, Allibert, Escape, Fnac.com, Ushuaïa TV), Polytech' Grenoble (notre école) et Las Cordilleras (notre logement au Pérou).