Changement d'époque, changement d'ère, la fièvre de l'or blanc gagne la France dans les années 60 et les politiques d'aménagement de la montagne pénètrent avec frénésie les vallées Alpines. « Les nouvelles théories veulent qu'il faille grimper sans cesse plus haut pour aller chercher la neige poudreuse ou dure comme glace qu’il faudra rentabiliser été comme hiver » écrit Danielle Arnaud dans son livre pamphlet "la neige empoisonnée". Comme chez Samivel, la splendeur immaculée du royaume blanc laisse place aux fous d'Edenberg. On ne jure plus que par le ski d’été qui doit faire tourner les stations douze mois sur douze. « Les investisseurs plaçaient les plus grands espoirs dans la pratique du ski d'été pour faire "décoller" quelques-unes des stations nouvellement installées en altitude et qui ne fonctionnaient, jusqu'alors, qu'en hiver. Tignes, Val-Thorens, La Plagne, mais aussi les Deux-Alpes et l'Alpe-d'Huez se sont, à grands frais, emparées de quelques glaciers pour y planter leurs remontées mécaniques » écrit Claude Francillon en 1984.
Dans les années 80, les Arcs veulent rejoindre le cercle fermé des stations organisant du ski d’été. Les plans des pistes de l’époque dessinent les remontées mécaniques projetées pour équiper le petit glacier du Varet. Le téléphérique de l’Aiguille Rouge construit en 1981 permet de concrétiser cette idée qui attendra l’année 1988 pour ressortir des cartons. Le conseil municipal envisage de doubler son axe sommital et décide enfin l’installation d’un téléski au Varet. Janvier 1989, le projet se double d’un télésiège. Le 6 juillet 1989, la presse régionale titre sur le ski d’été aux Arcs … mais les équipements n’ont pas été réalisés et les skieurs étrennent le ski d’été en profitant de rotation sous le téléphérique. L’épisode tourne court avec une canicule précoce et un cocasse accident puisqu'un skieur fait une chute sans gravité dans une crevasse. 1990, la station est prête à relancer son grand projet. Les brochures titrent déjà sur le retour du ski d’été. Las, l’expérience tourne court et de ski d’été il n’y aura plus ou il n’y en a jamais eu d’ailleurs.
Néanmoins, le névé de Leissières propose très vite un terrain de jeu limité notamment du fait de sa fonte sous les chaleurs d'août. Aussi, afin d'intensifier les possibilités de ski d'été, le club des sports et le syndicat d'initiative décident d'équiper, sur le versant opposé, le glacier de Pissaillas. L'histoire débute en 1962 avec la construction du télésiège du Grand Pissaillas et, pour la première fois en France, l'implantation de téléskis à ancrage fixe sur la glace. C'est le Préfet de la Savoie, Maurice Roche, qui donne dans un même courrier amphigourique en avril 1962 son aval pour la création du parc national de la Vanoise et ... pour l'exploitation des glaciers à des fins de ski d'été : « Le problème de l'équipement en remontées mécaniques des grandes stations de sports d'hiver de Tignes et Val d'Isère a reçu une solution tout à fait satisfaisante en dégageant du Parc, pour les incorporer à la zone périphérique, les zones à vocation touristique hivernale de la région du Col de l'Iseran et de la Grande Motte - les équipements de remontées mécaniques pourront y être implantés librement ».
Les années 70 constituent la période la plus prospère sur le plan de l'aménagement du secteur de Pissaillas avec un point culminant atteint avec le téléski de la côte à 3 300 mètres et l'exploitation d'une dizaine d'appareils.
Le domaine de ski d'été des Grands Montets nait en 1964, un an après l'installation du second tronçon du téléphérique reliant le village d'Argentière au sommet des Grands Montets à 3 300 mètres par le plateau de Lognan. On skie alors jusqu'au mois de septembre sur le glacier de la Pendant et les contreforts de l'aiguille Verte dans la familiarité des aiguilles, des glaciers et des séracs. On ne sait pas très bien combien il y a eu de téléskis là-haut pour s'adonner à la glisse estivale, deux, trois ? Les bonnes années, on parcourt les pentes sous la télécabine de la pendant (Bochard). Malgré sa situation exceptionnelle, les Grands Montets, reste un domaine mystérieux, mal documenté et ayant vécu dans l'ombre de l'Index qui avait la faveur des huiles chamoniardes.
« En haute montagne, le recul des glaciers remet en cause la pratique du ski d’été » estimait la cour des comptes dans son rapport de 2018. Pour poursuivre dans le jeu de mots littéraire, ils partirent à 14 et se retrouvèrent à trois et demi (Tignes, les Deux Alpes, Val d'Isère et la Grave où le ski d'été débute de façon météorologique) à continuer à offrir du ski d'été mais pour combien de temps encore ? Si l'offre de ski d'été s'est considérablement réduite à cause du retrait glaciaire, le ski d'été est aujourd'hui à la jonction des effets du réchauffement climatique et de l'évolution sociétale. « Ce qui était présenté dans les années 1960-1970 comme l’horizon du développement du ski en double saisonnalité se trouve réduit à la portion congrue, et la fréquentation des sites concernés n’a cessé de chuter depuis cette date. Il s’agit donc d’une activité en suspens, une survivance d’un produit touristique affiché comme moteur dans les années 1970, et par ailleurs largement remis en cause » disait justement Lionel Laslaz en 2009 dans les cahiers de géographie. Contrairement aux stations Autrichiennes comme Mölltal ou Hintertux, les stations françaises n'ont pas fait le pari précoce d'installer des canons à neige sur les glaciers pour aider artificiellement à leur régénération. Le ski d'été n'a plus la côte et se heurte aujourd'hui à des considérations environnementales nouvelles et à une diversification de l'offre estivale en montagne. La promesse des stations ouvertes 365 jours par an doit faire face également à un autre paramètre et non des moindres, des glaciers en grande souffrance, "figures symboles" des signaux de modification des conditions climatiques. Si à certains endroits, la pratique du ski d'été a été rendue définitivement impossible, à Tignes ou aux Deux Alpes, les domaines sont amputés en grande partie et n'ont plus rien à voir avec la pratique des années 70 et 80. « Nous nous entrainions sur le secteur du télésiège du Jandri IV. Le télésiège n'existe plus aujourd'hui. Pour avoir passé du temps sans fréquenter régulièrement le glacier, je ne retrouve plus sur le glacier la même configuration des pistes telles qu’elles ont existé quand je montais là-haut en 95. L’échine de la Chèvre, le Signal, le dôme...le glacier des Deux Alpes a complètement changé de physionomie, pleins de rochers sont apparents » nous raconte Dorothée Fournier, ancienne membre de l'équipe de France de snowboard.
Dans quelques années, le ski d'été ne sera sans doute plus qu'un souvenir et on se dira "tiens, tu te souviens des sports d'hiver que l'on pratiquait toute l'année ?".
Le domaine de ski d'été des Grands Montets nait en 1964, un an après l'installation du second tronçon du téléphérique reliant le village d'Argentière au sommet des Grands Montets à 3 300 mètres par le plateau de Lognan. On skie alors jusqu'au mois de septembre sur le glacier de la Pendant et les contreforts de l'aiguille Verte dans la familiarité des aiguilles, des glaciers et des séracs. Pierre-Louis Roy dans son livre « Une histoire de l'Aiguille du Midi et des téléphériques » décrit le domaine estival des Grands : « Jusqu'en 1972, Max Michel (le directeur de la Société pour l'Aménagement Touristique Argentière Lognan) développe le ski d'été grâce à trois téléskis d'appoint celui de la petite Verte qui dépasse les 3300 mètres (sous la rimaye de la petite aiguille verte), celui du Pas de Chèvre vers l'ouest et celui des Rognons, côté point de vue, vite démonté car englouti sous 10 mètres de neige ». Les bonnes années, on parcourt les pentes sous la télécabine deux places de la pendant (Bochard) construite en 1968. Malgré sa situation exceptionnelle, les Grands Montets, reste un domaine mystérieux, mal documenté et ayant vécu dans l'ombre de l'Index qui avait la faveur des huiles chamoniardes.
A Chamonix, la journée du skieur d'été commence à 7h30. En neuf minutes, un téléphérique vous emmène à 3 300 mètres. D'abord, en chemisette, puis en maillot de bain (mais gare aux chutes !), Jacqueline, Colette, Régine et René, une bande de jeunes chamoniards, skieront jusqu'à 13 heures ; le soleil a alors trop amolli la neige.
Les vainqueurs incontestés de la course à l'altitude dans les années 60 sont les Huizats avec la mise en service du troisième tronçon du téléphérique des Grandes Rousses en 1963 considéré alors comme une prouesse mondiale capable de rivaliser avec l'Aiguille du Midi. L'accès au Pic Blanc, à 3 327 mètres, élargit l'espace skiable avec des pistes sportives mythiques qui feront la réputation de la station « mais un autre avantage aussi important qu'intéressant est la réelle possibilité de la pratique du ski d'été en atteignant le haut du glacier de Sarenne » commente J. Arnaud dans la revue le SKI. En juillet 1965, le ski se sédentarise sur le glacier avec l'installation de deux fils neige. On fait aussi des rotations entre le glacier de Sarenne et la gare aval du téléphérique à travers un tunnel percé l'année précédente. Le journaliste Alain Vernholes raconte son expérience en août 1968 dans les colonnes du Monde : « trois kilomètres seulement et il a fallu longtemps pour grimper jusqu'ici, accroché par un câble. Le soleil commence à découvrir la montagne. Dans quelques heures, la neige sera pleine d'eau, la chaleur formidable. Mais maintenant, la pente est encore toute gelée. Un petit tunnel troue la montagne et nous relance sur un autre flanc, vaste et long comme un mur de citadelle. Dans le ciel passe une télécabine très haut suspendue au-dessus de nous ». C'est aussi la période où le Grenoble Université Club, célèbre club omnisports de la cuvette dont Jean Vuarnet fût l'un des athlètes phares, déménage ses stages d'été du refuge Adèle Planchard au glacier de Sarenne. En 1969, l'Alpe d'Huez inaugure son télésiège du glacier avec l'objectif de populariser le ski d'été sur un glacier « sans crevasse ». Le Dauphiné Libéré détaille encore : « si la pratique du ski de glacier était jusqu'alors réservée à l'élite des skieurs et souvent des skieurs de compétition avec l'aménagement du glacier de Sarenne, cette discipline sportive est désormais offerte à tous ». La presse locale n'hésite pas à désigner l'Alpe d'Huez comme la Mecque du ski d'été. La transition entre l'insouciance climatique et la réalité du pergélisol se fera au début des années 90. Si en 1984, l'installation du téléski du refuge a permis de tripler le domaine skiable d'été de la station dauphinoise, six ans plus tard c'est la désillusion avec l'impossibilité d'ouvrir le glacier. Ce dernier perd tellement de volume que l'on démonte un à un les téléskis entre 1988 et 1993. Jadis orgueil, le ski d'été s'achève en catimini même si en 2004 le maire de l'époque s'imagine redynamiser le ski d’altitude de la Toussaint et garantir un ski d’été de qualité avec l'installation de deux télésièges. Édile de mauvais augure...
Poursuivez votre lecture avec les autres articles de notre saga du ski d'été :
Intro : Pour qui sonne le glas(cier) ? : anthologie du ski d'été en France
Chapitre I : l'avènement du ski d’été et premiers domaines sur les hauteurs de Chamonix
Chapitre II : les années 70, la course aux 3000 et aux neiges éternelles, les ski 365 jours par an
Chapitre III : le ski d'été dans la Vallée de l'Oisans : le refuge Adèle Planchard, l'Alpe d'Huez, les 2 Alpes et la Grave
Chapitre IV : sur la ligne frontière, domaines skiables entre la France et l’Italie
Chapitre V : utopies, fugacités et perspectives : Val Thorens et autres lieux singuliers
12 Commentaires
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En fait il s’agit du 2e téléski sur le Glacier des Grands Montets, sous la Petite Verte, concrètement au départ du Pas de Chèvre pour ceux qui connaissent.
On le voit clairement sur la photo en PJ, qui vient de remontées-mécaniques.net
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Ça a un côté rafraîchissant tous ces gens qui skient en maillot de bain...sans casque ni attirail devenu quasi obligé.
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j'avais pas posté mais super série il manque juste qq indications de dates (ou fourchettes ) de photos/cartes postales de collection .
pour l'international la bonne adresse est là
sommerschi.com
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