tiens un texte que j'avais conservé en provenance du
www.gf38.net (comme quoi les footeux sont pas tous des couillons
) enfin appremment el gars bosse au DL et a fait des etudes d'histoire ...
"PATRIMOINE GRENOBLOIS
Ah, voilà un sujet qui m'intéresse au plus haut point!!
Effectivement, comme le dit Saxe, je m'y connais un peu plus en Histoire du Dauphiné (principalement celle de ses 7 Merveilles ) qu'en campagne d'Egypte napoléonienne...
Tout d'abord, il faut savoir que notre région a été, de la chute de l'Empire Romain à la Révolution, l'une des plus pauvres du royaume.
Au niveau du patrimoine architectural, il est frappant de constater que les fleurons du Dauphiné sont contenus dans la liste EXHAUSTIVE suivante : l'abbaye de Saint-Antoine, le château de Vizille, la façade du collège des Jésuites de Grenoble (côté du collège Stendhal donnant sur l'office du Tourisme), le château de Septême, Grignan (à la limite du Dauphiné), Fort-Barraux, Mont-Dauphin, Château-Queyras, Virieu, Crémieu, le couvent de Ste-Marie d'en-Haut (musée Dauphinois), le groupe épiscolpal grenoblois, et le couvent de la Grande-Chartreuse (mais les bâtiments actuels datent des XIXe et XXe siècles...). Parmi ces rélaisations, seuls le château de Vizille et à la rigueur St Antoine l'abbaye sont vraiment riches.
Comparez cette piteuse liste au Pays de la Loire, au Bassin Parisien, à l'Alsace, au Périgord, au Béarn, à la Bretagne... Il n'y a clairement pas photo.
Cette pauvreté s'explique par plusieurs faits : tout d'abord, le Dauphiné, jusqu'à son transport au Royaume de France en 1349, était une principauté pauvre, et les maigres revenus du Prince servaient à satisfaire son estomac ou son confort personnel. Par la suite, rattaché à la couronne, le Dauphiné présentait le double désavantage d'être à la fois une Province-frontière et montagneuse. Cela induisait un stationnement de troupes permanent, et qui dit garnisons dit certes lieux "prestigieux" pour l'abriter (Château-Queyras, Fort-Barraux, Mont-Dauphin, Briançon, Sisteron), et sous cet aspect le patrimoine montagnard (les routes d'Italie et de Savoie) est plus riche que le patrimoine des plaines. Mais qui dit garnison dit aussi pillages incessants, et surtout en cas de conflits, une Province toujours la première à pâtir des combats et la dernière à en sortir. Ajoutez à cela des terres peu fertiles (hormis la Valloire et le Grésivaudan), cela vous donne l'archétype de la province pauvre. D'ailleurs, les montagnards vivaient beaucoup mieux que les gens des plaines, et les gros bourgs des massifs, organisés de manière très resserrée, vivaient dans l'opulence, en autarcie et en autodépendance, grâce à la richesse de leurs pâturages, de leurs dérivés, et de la mise en commnauté des biens (beurre, fromage, viande, fourrage, ...).
Ensuite, pour en venir à Grenoble même, effectivement, elle a toujours souffert de la concurrence d'autres villes qui ont entravé son développement. A l'époque romaine, cette partie de la Gaule est bien entendu sous la coupe de Lugdunum, capitale des Celtes, et la Gaule Alpine dépend entièrement de Vienne, riche satellite de Lyon. Au début du Moyen Age, Grenoble connaît une poussée démographique plus forte que ses voisines, et s'impose comme une ville d'importance dans la région. Mais Vienne et Valence, sises dans la commerciale vallée du Rhône, sont largement plus attractives et développées. Après l'an mil, les Princes du Dauphiné sont plus ou moins sédentaires, mais leurs allées et venues incessantes font qu'aucune ville ne sort grandie de leur présence (Septême, Roussillon, St Marcellin ponctuellment). Lors de son rattachement à la France en 1349, le Dauphiné compte donc (et comptera jusqu'à la fin de l'ère moderne) un maillage d'une dizaine de bourgs, dont aucun ne se détache vraiment (dans l'ordre démographique Vienne, Grenoble, Valence, Romans, Briançon, Gap, St Marcellin, Die, Crest, Chorges, Guillestre, La Mûre, Voiron, St Bonnet en Champsaur, Buis-Lès-Baronnies...). Les villes des montagnes sont attrayantes par les foires qui s'y déroulent, alors que Vienne, Valence et Grenoble se disputent la suprématie provinciale. C'est le dauphin Louis II (futur Louis XI de France) qui va donner un gros coup de pouce à Grenoble en y créant le 3e Parlement de France (après Paris et Toulouse) en 1454, et en s'y basant durant les 8 ans qu'ils passent en Dauphiné. Grenoble devient et restera une ville "de la basoche", c'est à dire des "administratifs", juristes, légistes... De son côté, Vienne est en déclin certain, alors que Valence ne doit sa relative puissance qu'à la présence de l'université de la province.
Grenoble se peuple durant la période essentiellement de législateurs, puis d'une importante garnison (qui représentera parfois 20% de la population). Mais malgré cela, la ville, qui compta 10 000 habitants de 500 à 1600, puis 15 000 en 1700, 20 000 en 1800 et 25 000 en 1830, ne parviendra jamais, pour les raisons susdites, à rivaliser avec de vraies, riches et incontestées capitales de Province telles que Toulouse, Bordeaux, Nantes, Nancy, Orléans, Tours, Rennes, et des villes encore hors du royaume comme Lille, Nice ou Strasbourg. Il est flagrant de constater que Clermont, capitale d'une province comparable au Dauphiné (moins le côté frontalier), a connu le même essor que Grenoble, et possède un patrimoine aussi insignifiant que celui de la "capitale des Alpes".
Pour revenir à Grenoble, la seconde partie du XIXe siècle lui a bien sûr été plus profitable (houille blanche, industries de la ganterie, du chanvre, de la viscose), et elle atteignit 60 000 habitants à la fin du siècle. Mais, comme ça a été dit, et comme les villes issues de la révolution industrielle, c'était plus du "remplissage" qu'autre chose. Il y avait un grand besoin de main d'oeuvre (ce sera pareil au XXe siècle avec Lustucru, Cémoi, Lou, Valisère, puis MG, Caterpilar, Teisseire...), mais les villes ne profitent pas de la poussée démographique pour s'embellir.
Aujourd'hui, le tournant des nanotechnologies, de la recherche scientifique, de l'université et du tourisme font que Grenoble est en partie en train de réussir à subsister dans le paysage français et européen, mais bon, tant bien que mal.
Voilà donc en partie pourquoi Grenoble, comme la région, manque cruellement de patrimoine. Il suffit de regarder la ville de la Bastille : toits rouges : époque moderne : environ 5% de la surface ; toits gris : XIXe siècle : environ 10% de la surface ; barres d'immeubles : XXe siècle : 85% de la surface. Ce ne sont que les stigmates du poids de l'Histoire...
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Ojeda, lejos por la distancia y contento de lo estar. "
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