A l'occasion de la parution de son livre sur les pistes de descentes françaises, Gille Chappaz nous livre les bonnes feuilles de cet indispensable de la culture ski.
La descente a 100 ans ! L’épreuve-reine du ski alpin fête son centenaire avec un livre, Pistes de légendes, dont l’auteur, Gilles Chappaz, nous livre quelques pages. Editée par Glénat, une telle somme consacrée au ski est assez rare pour être largement et goûlument soulignée...
Mémoire du ski alpin, ancien rédacteur en chef de feu Ski Français, l'auteur revient en détail sur les 11 pistes de descentes dessinées sur les pentes des domaines skiables français : Casserousse à Chamrousse, Emile-Allais à Megève, la Face, OK et Rhône-Alpes à Val d’Isère, Jean-Blanc à Courchevel, Jean-Vuarnet à Morzine-Avoriaz, Léo-Lacroix aux Menuires, Luc-Alphand à Serre-Chevalier, Roc-de-Fer à Méribel et la Verte aux Houches.
Il raconte avec beaucoup de détails et d’anecdotes (l’histoire de la Léo-Lacroix aux Menuires par exemple, piste imaginée de toutes pièces, adulée puis délaissée) les spécificités de chaque piste, dont le dessin exact a parfois été difficile à retrouver.
Une mine d’informations à lire alors que la prochaine étape de la coupe du monde va se dérouler en France sur la Verte des Houches pour le Kandahar les 29 et 30 janvier prochain (après deux ans de pause pour cause de JO et de Championnats du monde). Voici les bonnes feuilles de l’introduction : la naissance de cette spectaculaire épreuve.
La légende retient que le 6 janvier 1911, une dizaine de skieurs, exclusivement des Britanniques à l’âme pionnière, répondent à l’invitation d’un certain Arnold Henri Moore Lunn, skieur de la première heure et fils désœuvré d’un voyagiste en vogue, d’en découdre du côté de Montana, haut lieu du « skiing and mountaineering » dans le Valais. Après une grimpette de « 4000 pieds » (1200 mètres environ !), et une nuit passée à 2800 mètres au Wildstrübelhütte, nos 10 téméraires vont se lancer « schuss » -le mot fera son apparition officielle en… 1932 !- dans la pente en direction du glacier de la Plaine Morte pour ensuite le traverser (cinq kilomètres éprouvants) et rejoindre « l’arrivée » par une longue descente vers le plateau de Montana. Il faut quasiment une heure d’effort aux meilleurs pour dompter les 5000 pieds de dénivelé de cette course historique. (...)
Oui mais voilà, en fouillant un peu, on s’aperçoit très vite que la descente est vieille comme le ski. Et que sir Arnold, excellent communicant s’il en fut, a très bien su faire connaître et populariser ses initiatives plus ou moins inédites…
Quoi de plus évident en réalité que de vouloir aller le plus vite possible en plongeant dans la pente dès lors qu’on maitrise un tant soi peu les caprices de deux planches de bois ? Et quoi de plus naturel, tant l’esprit de compétition est inscrit dans les gènes de l’humanité, que de vouloir se confronter à ses petits camarades ?
C’est ainsi que Serge Lang, l’un des créateurs de la Coupe du Monde de ski dans sa version actuelle, a repéré au cours de ses recherches passionnées des traces de descente plus ou moins organisée « durant l’époque préhistorique » du ski aussi bien en Australie, « entre mineurs venus d’Europe septentrionale qui occupaient leurs loisirs à des courses de descente », qu’Outre-Atlantique, « où des épreuves semblables opposaient bon nombre de héros de la conquête de l’Ouest… ». (...)
En réalité, la contribution historique d’Arnold Lunn, anobli en 1952 « pour services rendus au ski britannique et aux relations anglo-suisses », repose sur sa faculté à penser l’organisation réglementaire du ski de compétition version descente. A partir d’un précepte simplissime, très british, « keep the tips pointed downhill ! » (gardez les spatules pointées vers le bas !), il a été le premier à véritablement introduire l’idée du parcours imposé et chronométré.
(...) A son Congrès d’Oslo en 1930, après six belles années de bagarres épiques et de mémorables morceaux de bravoure entre alpinophobes et alpinophiles, la FIS, sur proposition suisse, officialise l’organisation d’épreuves internationales de ski alpin. Une décision prise à une surprenante unanimité (15 nations !) qui va changer de manière radicale et historique le visage du ski mondial. (...)
La vraie descente implique du cran et de l’audace. Elle est l’essence du ski. Elle est un acte naturel. Elle est ce « défi victorieux à partir de la seconde fatidique du début de la plongée vers le fond de la vallée, une attitude héroïque en regard de tout ce qu’elle exige d’abnégation » (Serge Lang). Elle est la discipline des braves. De celles et de ceux qui sont capables de se transcender en donnant libre cours à leur talent et à leur intrépidité. (...)
Au début, il n’est évidemment pas question de baliser le terrain ni de damer l’itinéraire. La philosophie initiale consiste, on l’a dit, à aller le plus vite possible du haut en bas, un état d’esprit que résume si bien le slogan savoyard : « tôt dré dans l’pentu » ! Les Italiens, joueurs et latins, ont cette définition : « Libera ». On ne peut être plus explicite… Chacun fait sa trace, choisit ses passages, imagine son cheminement. Le chronomètre rend son verdict et entérine les bons et les mauvais choix. (...)
Mais évolution du matériel, des techniques et des mentalités oblige, il faut au fil des ans choisir un terrain d’expression adapté et le façonner aux exigences du moment ; dessiner en quelque sorte ces fameuses pistes de descente, à la fois source d’inspiration des champions et objet de fantasmes des skieurs du dimanche.
A partir des Jeux de 1936, alors que le champion Birger Ruud, sauteur de formation, utilise un rocher comme tremplin pour shunter un passage et que d’autres finissent leur course dans les arbres, organisateurs et fédérations s’efforcent d’aménager des pistes idoines. Ainsi, pour les Championnats du Monde de 1937, la piste des Houches, inaugurée pour l’évènement, propose aux concurrents un parcours certes libre, sans porte de direction contraignante, mais conditionné par une succession d’options logiques et de passages imposés, qui n’empêchent toutefois pas les « descendeurs » de prendre des raccourcis…
Mais ce n’est qu’après la deuxième guerre mondiale que naissent le concept de « piste de descente » et le principe de leur homologation. La France, jusqu’alors en retrait dans l’évolution du ski de compétition, fait partie des nations pilote. Pas question que les Anglais gardent le leadership ! La parole appartient désormais au terrain et à la pente.
On découvre alors que le domaine skiable français, l’un des plus beaux du monde, cache quelques délicieuses pépites. Des pistes de descente magnifiques. Des pistes sur lesquelles vont s’écrire quelques pages essentielles, belles souvent dramatiques parfois, de l’épopée du ski moderne. »
9 Commentaires
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Par contre le "La descente à 100 ans !" pique un peu.
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Sir Lunn est l'un des fondateurs du Kandahar... The Murren boys. lol !
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