Les skis Apo (exclu)

Mercredi 16 janvier 2008. Rendez-vous à Montchavin les Côches sous les flocons frais et de taille pizzaïesque pour retrouver Sam Rochet et Régis Rolland. Ils sont là, skis en main, des skis Apo ! Le lieu n'est pas anodin, c'est là où avait lieu la Family of Friends, rassemblement freeride du début des années 2000 où Sam Rochet réunissait la crème du freeride. Sam parlait déjà de trois choses : des skis larges pour tout le monde, une sensibilisation sécurité avalanche... et des skis Apo. Huit ans plus tard, le rêve est réalisé : les skis Apo sont là, pétillants, joueurs, ils baignent dans l'univers graphique d'Apo et dès leur vente en septembre 08, ils seront accompagnés d'une sensibilisation avalanche maligne.

Des skis ? Oui, des skis ! "Je vais me faire excommunier par les snowboarders ! ", rigole Régis, "mais le freeski, c'est le même monde que le snowboard, les mêmes codes graphiques, les mêmes fringues". La gamme commence à 92 mm sous le pied et propose un modèle à talon plat (le Wyatt, avec 98 mm au patin), des twin tip (Starsky, 92 mm), un ski girl (Marielle, 92 mm) et un junior (Malcolm, 92 mm). "On veut revenir aux bases, rester simple, faire des skis ludiques pour tout le monde avec de belles décos (sous les pinceaux de Thomas Nicolas, ndlr). Ca me gêne de l'appeler twin tip, ça l'assimile au freestyle alors qu'il n'y a pas mieux pour s'amuser : leur plage d'utlisation est monstrueuse. On n'a peur de rien, on n'a pas de casseroles, d'ingénieurs qui font de la compétition depuis vingt ans dans nos bureaux de developpement !". Et au passage le logo de la marque perd le "snowboards" pour devenir "Apo" tout court.

Régis nous détaille la gamme complète :



Sur la neige, nous testons d'abord le Wyatt (un ski qui ressemble vaguement au BSquad avec sa spatule de requin). Il a des lignes assez tendues et un étonnant talon plat old school. Les premières sensations sont saines, le ski est bien posé (il fait quand même 98 mm au patin, 189 cm de long) dans les 15 centimètres ultra-légers qui continuent à tomber. A l'oeil, le Wyatt est massif, solide, rigide. Sous le pied, c'est exactement l'inverse : le basculement sur la carre est immédiat, on ne sent pas la longueur, ils sont très maniables et déjaugent tranquillement. On va jouer dans les sapins, en suivant Sam qui connaît le spot par coeur et Régis qui mobilise ses souvenirs de skieur ("je n'ai pas fait une journée de poudreuse en ski depuis vingt ans !"). Le ski tourne sans effort, il faut quand même être présent sur l'avant, lui donner de l'énergie, ce n'est pas un ski qui se pilote sur le siège arrière. Grandes courbes de géant sur la piste à Mach 2 ? Ca tient impeccable.

L'autre modèle, c'est le Apo Starsky, en 179 cm de long, bi-spatulé. Même surprise sur ce ski qui ne se comporte pas comme il en à l'air. J'attendais un ski souple (dans la lignée du Public Enemy de K2), tout en déformation, tranquille. Et je trouve à qui parler sous les pieds : il rebondit, garde la tête haute en poudreuse, tient la vitesse en grande courbe, les appuis sont solides tout en gardant un comportement général très joueur et mobile. Avec un peu plus de longeur, c'est l'arme idéale pour... tout ! Sur le télésiège, Régis et Sam échangent leurs impressions sur les skis, cogitent la future gamme 09 et l'organisation de la grande tournée des Ducs pour présenter le ski aux 70 détaillants qui le proposeront en test cet hiver (la liste est ici).

Mais la question qu'on a envie de poser à celui qui nous a tous mis sur un snowboard, c'est : Régis, pourquoi des skis ? "Le marché du snowboard est clairement mûr, voire en déclin, il faut se diversifier. Le snowboard, c'est 20% du business en Europe, 80% pour le ski. Avec Apo, j'ai déjà la structure de fabrication et de distribution, lancer des skis n'est pas trop compliqué. Je pense au ski depuis longtemps (je suis skieur avant d'être snowboarder) et cette année, tous les éléments étaient réunis pour réussir le projet : les bonnes personnes, le marché et l'usine", explique Monsieur Apocalypse qui s'est décidé en mars dernier. "J'ai mûri, j'ai été rassuré par Bob et par la qualité des skis d'autres marques qui sortaient de l'usine en Chine. J'en ai reparlé à Sam Rochet, à l'équipe Apo et allez, banco ! On me disait : et l'image de marque d'Apo ! Je ne me fais aucun souçi, je ne suis pas conservateur à 47 ans, je ne veux pas rater l'ouverture que représente le ski".

L'analyse de Régis :

Régis, Sam et Bob se sont alors assis pour composer la gamme. Eric "Bob" Bobrowicz, c'est 15 ans de snowboard chez Rossignol, c'est la naissance des skis Scratch et aujourd'hui un shop à Serre-Chevalier, Ride-doctor.com (il vend sous ce nom les skis conçus avec Apo). Sam Rochet est ancien bosseur, ancien rider pro, freerider jusqu'à la moëlle, patron du shop Freeride Spirit à Montchavin et organisateur de la Family of Friends."On essaye de raisonner simplement, de revenir aux bases dans la structure de la gamme et dans les constructions : boite de torsion, quatre couches de fibres de verre (trois pour les femmes, ce qui allège et assoupli). On ne fait pas la guerre marketing technologique. La boite de torsion n'a rien de révolutionnaire mais c'est ce qui est de plus costaud, de plus réactif et qui offre une large palette d'utilisation", détaille Régis.

Sam résume l'esprit dans lequel les skis ont été conçus, entre méthode française et méthode K2 :


"Sans la bonne usine, je n'aurais pas pu lancer les skis, poursuit Régis, elle est neuve, aux normes européennes, les gens qui la gèrent en Chine sont d'anciens associés avec une grosse expérience, on se connait très bien et ce lien privilégié est une force. La qualité est excellente et tous les ingrédients des skis viennent d'Europe. On me dit que ce n'est pas génial pour l'environnement, mais il faut savoir que les bateaux-containers reviennent d'Europe vers la Chine quasi vides et que le bateau produit très peu de CO2 par tonne de matière transportée, beaucoup moins qu'un camion venu d'Autriche par exemple.
Je préfererais fabriquer ici à Aix les Bains, mais c'est injouable. Les gens veulent payer le matos moins cher mais dès que tu vas en Chine, ils crient au loup".

Enfin, chaque ski vendu apportera sa pierre à la sensibilisation avalanche du skieur. "Nous assumons nos produits, au niveau de la construction, de la déco, mais aussi leur utilisation finale en poudreuse", explique Sam Rochet. "Il faut donc réfléchir à une façon de faire passer le message de sécurité avalanche. Nous amenons des éléments simples et nécessaires sous formes d'autocollants. Le but est de donner plus de clés au skieur qui sort des pistes". La journée se termine par une décoction à base de marc de Savoie bio avec de vrais raisins dedans, une cheminée qui ronronne, les pompes de ski qui sèchent devant : le bon moment pour refaire le monde du ski. Ce n'est jamais inutile.

Texte, photos et interviews : Guillaume Desmurs


La gamme des skis Apo (dessus et semelle):

-Wyatt, modèle talon plat : 98 mm au patin, disponibles en 179 et 189 cm de longueur. Prix de vente : 589 euros.

-Gamme twin tip : 92 mm au patin.
Starsky (179, 173, 167 et 161 cm / 489 euros).
Marielle (167, 161, 155 et 149 cm / 439 euros).
Malcolm, le ski junior avec exactement la même construction que le ski adulte (149 et 155 cm / 389 euros).
(prix : skis nus)