Peaches (10 novembre 2007 08 h 35) disait:
Tchak-Tchak : Pourquoi es tu contre en Europe uniquement?
Arf, pour répondre à ça, je pense qu'il faut avoir vécu ou au moins voyagé un peu en dehors de l'Europe justement. Désolé de pourrir le sujet, mais je vais en profiter pour écrire une longue réponse, et je la reposterai à chaque fois qu'une discussion sur l'héliski ressortira. En espérant que les obtus ou les mous du bulbe intégristes de "l’héliski c’est mal" à la sauce Marc & Co puissent trouver dans ces lignes les quelques infos qui leur manquent cruellement pour bien comprendre et cerner le problème.
Tout d'abord, ce qui choque les nords américains quand ils débarquent dans les Alpes (comme ma copine il n'y a pas si longtemps), c'est le nombre de villages, d'habitation, de routes que tu peux trouver dans chaque vallée. En montant au refuge de Gramusset, elle m'a même dit : "c'est super, ca ressemble aux villages dans Heidi"... Effectivement, elle n'avait jamais vu quelque chose de similaire en vrai.
Soyons clairs, en Eutope, tu n'est JAMAIS à plus de 10 km d'un lieu habité et/ou accessible par des moyens mécaniques. De plus, il y a des refuges partout, parfois même gardés, bref, soyons clairs, aucun sommet, aucune pente, aucun endroit de montagne n'est inaccessible modulo une nuit en refuge maximum. Tout est là, à portée de main, facilement accessible en 2 jours de ski de rando au maximum, soit un week end. Dans ces conditions, utiliser un hélico, c'est vraiment gacher du kérozène, ET faire chier les habitants des vallées, ET faire chier les animaux du coin.
Maintenant, va faire un tour dans les rocheuses canadiennes (ça je connais bien), en Alaska ou en Oural (là je connais nettement moins mais je suppose que ca ressemble pas mal...). Tu vas être sur le cul de te rendre compte que... C'est vide. Pas de villages, pas de stations, pas d'habitations, RIEN. Au Canada, dès que tu te promènes sur la Highway 1 autour de Revelstoke ou entre Banff et Jasper, tu vas voir de sympathiques panneaux te disant que le prochain lieu habité pour trouver de l'essence se trouve 130 km plus loin. Et encore, ça c'est dans les parties les plus habitées du pays, je ne parle ni du grand nord ni du nord de la BC. De plus, certes, il n'y a pas d'habitations, mais il n'y a pas de routes non plus. Non. Sincèrement. RIEN. Des espaces immenses (bien plus grands que des départements francais) n'ont tout simplement AUCUN moyen d'acces terrestre en hiver, les rares chemins étant récouverts par des mètres de neige.
Un exemple tout bete : dans une des parties les MOINS sauvages de la BC, à proximité de certaines villes pourtant, se trouve l’endroit qui a vu naitre l’héliski au Canada, le parc des Bugaboos. Si tu vas grimper en été là bas, tu vas trouver la base héliski de CMH au bout de 42 km de piste de terre. Sachant qu’il tombe entre 12 et 18 mètres de neige par hiver dans le coin, je te laisse imaginer la facilité de l’accès autrement qu’en hélico.
Il faut y être allé pour réaliser ça. Même en été, quand tu fais du VTT et que tu te rends compte que la première route est à plus de 35 km et que bien sur les téléphones ne captent pas, tu te dis qu'il vaudrait mieux ne pas avoir de pépin...
Dans ces conditions, il est clair que la majeure partie des pentes qui sont réservées à l'héliski sont de toutes façons inaccessibles autrement. Ces espaces sont vides, et l'hélicoptère est le seul moyen d'y accéder. Je n’ai pas encore fait d’héliski à proprement parler là bas (contrairement à pas mal de mes potes, ca viendra peut être cet hiver, je ne sais pas), mais l’hiver dernier, je me suis fait déposer dans un lodge situé à plus de 50 km de la première route pour une semaine de ski de rando. Et c’était super. Et je n’ai pas culpabilisé une seule seconde. Parce que il n’a pas d’autre moyen d’accéder à ces espaces. Tout simplement.
Alors si on pousse encore un peu vers l’Alaska, là je peux te dire que le ski de rando, tu oublies tout de suite. Monter en peaux sur ces sommets est IMPOSSIBLE, et serait de plus extrèmement dangereux, point. A cause des quantités de neige instable, à cause de l’éloignement, à cause des tempètes. Quant aux nuisances, certes, l’hélico pollue toujours autant, mais bon, ca ne fera pas trop chier les habitants du coin (densité de population de 0.4 hab/km2, véridique), et ça ne fait pas non plus chier les animaux (y’en a pas).
Pour conclure, un dernier exemple : l’été dernier, pour aller grimper le Mont Assiniboine, on avait le choix entre se faire déposer au lodge au pied de la montagne en 8 minutes d’hélico et pour 100$ (soit pas grand chose), soit se taper les 28 km d’approche (et 28 km retour) avec nos gros sacs à dos plein de matos de grimpe. Et bien crois-le ou non, on a décidé... de marcher. Parce que ca nous paraissait possible de le faire. Tout simplement. Je suis contre l’hélicoptère en Europe d’une façon générale parce qu’il est inutile (à part pour les secours), mais je ne suis pas contre lorsque c’est le seul moyen disponible ET lorsque les nuisances qu’il occasionne sont infiniment plus faibles, comme c’est souvent le cas hors-Europe.
inscrit le 16/10/04
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