Cerveau: à la recherche d'un étalon
LOS ANGELES (AP) - Les cerveaux humains sont tous différents, y compris ceux des vrais jumeaux. D'où la difficulté pour les chercheurs de définir une normalité pour cet organe encore mystérieux. Une tâche à laquelle se consacrent à l'heure actuelle des chercheurs américains grâce à la richesse iconographique d'un nouvel atlas.
Pas moins de 7.000 images du cerveau réunies dans cette nouvelle banque de données scientifique permettant aux chercheurs de comparer les images cérébrales provenant de populations très différentes, habitant dans sept pays de quatre continents. La plupart d'entre eux sont âgés de 20 à 40 ans, à l'exception d'une poignée âgée de seulement 7 ans ou au contraire de 90 ans. La compilation présente aussi des cerveaux de personnes souffrant de maladie d'Alzheimer, de syndrome alcoolique, d'autisme et de schizophrénie.
"Au départ, c'est un projet né de notre frustration", explique le Dr John Mazziotta, du consortium international sur la cartographie du cerveau, basé à Los Angeles, en Californie. "Depuis de nombreuses années, tous ceux d'entre nous qui étudient la structure et la fonction cérébrales se débattent avec le fait qu'aucun cerveau ne ressemble à un autre, ni par sa forme ou sa taille et encore moins par sa fonction (...) Mais on ne savait pas évaluer les différences entre eux ni comment les comparer".
"L'objectif est d'évaluer les différences entre les cerveaux", confirme le Dr Arthur Toga, un de ses collègues. Comprendre ces différences devrait fournir "un bon indicateur (permettant de faire le départ) entre une population normale et une population malade".
Cet atlas cérébral -disponible librement sur Internet- dresse une carte du cerveau dans ses multiples dimensions et fonctions. Il établit la courbe de l'activité cérébrale, localise précisément les différentes fonctions, notamment le centre de la parole, le circuit de la mémoire, les centres de l'émotion et du langage. Il souligne par ailleurs comment ces différentes fonctions peuvent varier d'un individu à l'autre.
En utilisant ces données, un chercheur peut réaliser toutes les combinaisons cérébrales qu'il souhaite pour un groupe d'individus donné -des femmes asiatiques de 20 ans, gauchères, par exemple- et les comparer avec celles d'une autre population pour déterminer les différences et les similitudes. Ces combinaisons "sont-elles différentes de celles d'un gaucher de 90 ans?", se demande Arthur Toga.
Certains résultats suggèrent notamment que le cerveau est plus réceptif à l'apprentissage de certaines fonctions à des stades spécifiques du développement. Il semble donc utile de cartographier le développement de certaines régions du cerveau, celles qui sont rattachées à ces centres d'apprentissage spécifiques.
Cette sorte de grand échantillonneur scientifique fournit un éclairage que les instantanés individuels ne peuvent pas donner, selon Michael Ackerman, membre de la Bibliothèque nationale de médecine.
"Quand on est capable de mettre ces cartes ensemble et de travailler, on peut découvrir des choses qu'on ne voit pas sur des clichés individuels. C'est toute la beauté d'un projet amalgamé", ajoute Michael Ackerman, qui supervise le Projet "Homme Visible", un atlas numérique comprenant des représentations détaillées et en trois dimensions du corps humain.
Toutefois, en tirer des conclusions est pour l'heure très délicat. "C'est très difficile de dire si telle partie du tissu cérébral est impliquée dans telle ou telle activité. Différents tissus peuvent être sollicités à différents moments", souligne Stephen Hanson, co-directeur du centre d'analyse cérébrale de l'Université Rutgers, qui n'est pas connecté au projet.
Arthur Toga estime cependant que la comparaison permet au chercheur de savoir à quel endroit une structure est le plus susceptible d'être sollicitée, même si la localisation exacte varie d'un individu à l'autre.
AP
inscrit le 08/11/01
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