Intéressant non ?
LE MONDE | 08.09.03 | 12h12
Le sildénafil, plus connu sous le nom de Viagra, va-t-il entamer une nouvelle carrière comme médicament permettant de lutter contre les effets de la haute altitude ? Cette hypothèse n'est pas tout à fait exclue depuis que le professeur Jean-Paul Richalet, l'un des grands spécialistes de la médecine d'altitude, a commencé à dépouiller les résultats "encourageants" d'une étude menée pendant huit jours cet été dans le massif du Mont-Blanc.
L'expérience a débuté le 18 juillet au laboratoire Vallot, à 4 350 mètres d'altitude, tout près du sommet du mont Blanc, où Jean-Paul Richalet a conduit depuis vingt ans une quinzaine de campagnes scientifiques. Douze hommes volontaires, tous alpinistes, jeunes et en bonne condition physique, ont été déposés par hélicoptère devant la porte du plus haut centre de recherche du CNRS avec 1,5 tonne de matériel et trois scientifiques. Le premier soir, tous somnolaient, migraineux et insomniaques, victimes des effets habituels de l'arrivée rapide en altitude. Le lendemain, les douze volontaires ont commencé, à l'aveugle, à prendre leurs trois pilules quotidiennes (un placebo pour la moitié d'entre eux, du Viagra pour les autres) et à se soumettre à des tests d'effort et à des échographies cardiaques et pulmonaires.
L'hypoxie ou manque d'oxygène, dont les effets se font sentir à partir de 3 000 mètres, provoque une altération provisoire de l'organisme qui se manifeste par des symptômes bénins (migraines, insomnies, nausées, perte d'appétit, etc.). Elle peut aussi dégénérer en œdème pulmonaire ou cérébral, parfois fatal. Selon l'hypothèse que l'équipe Richalet a entrepris de vérifier, le sildénafil aurait une influence bénéfique en altitude : en diminuant l'hypertension artérielle pulmonaire - cause principale de l'œdème pulmonaire -, il pourrait améliorer la circulation du sang dans les poumons, diminuer les symptômes du mal des montagnes et accroître les performances physiques.
Aussi prometteurs soient-ils, ces résultats demandent à être confirmés par d'autres études de plus grande ampleur. Il faudra donc attendre leur publication dans des revues médicales d'audience internationale pour décider de prescrire en haute montagne le célèbre médicament des troubles de l'érection.
Charlie Buffet
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 09.09.03
Lien : www.lemonde.fr/article/0,5987,3208--333063-,00.html
inscrit le 21/09/02
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