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Par Nathalie Lamoureux
Kalil Reza est un champion. La semaine dernière, ce skieur afghan a remporté la deuxième édition de l'Afghan Ski Challenge. Il ne va pas aussi vite que l'icône de ski-d'alpinisme Kilian Jornet, triple vainqueur de la Pierra Menta, course de légende dans le Beaufortain. Et ne compte pas comme le franco-Espagnol 500 000 mètres de dénivelé dans les jambes. Mais, pour sa mère et pour tous les habitants du village, Kalil est bien plus qu'un numéro dans un classement, c'est un héros. L'évènement s'est déroulé dans une région durement éprouvée par la guerre : la vallée afghane de Bamiyan, au nord-ouest de Kaboul, célèbre pour ses statues de Bouddha géantes (55 m et 38 m), détruites par les talibans en 2001.
Bamiyan, attraction phare
Dans ce pays, rongée par la corruption et la guerre civile, la vallée de Bamiyan apparaît comme une région relativement tranquille. Nichée à 2 500 mètres d'altitude, elle est restée la principale attraction touristique du pays. Au pied des collines entourant la vallée, d'innombrables grottes forment un vaste ensemble de monastères, de chapelles et de sanctuaires bouddhistes datant du IIIe au Ve siècle. Dans un rayon de 70 km à l'ouest de la ville de Bamiyan, le Band-e Amir, un chapelet de lacs émeraude enchâssé dans les falaises, est une petite merveille. Malgré le charme de la vallée, les touristes ont déserté. Un peu moins de 2 500 bourlingueurs n'ayant pas froid aux yeux ont été recensés en 2009, dont 800 seulement étaient étrangers. En période de paix, cette vallée accueillait 150 000 visiteurs, venus du monde entier.
Ils n'avaient jamais mis les pieds sur des skis
L'hiver, grâce à une exposition nord et un climat très sec, la neige poudreuse y est excellente et garantit de belles courses vierges de traces. L'an dernier, une petite équipe, formée d'employés du journal Swiss Neue Zürcher Zeitung et de quelques skieurs afghans passionnés, a décidé de fonder le Bamiyan Ski Club et d'organiser une compétition de ski de randonnée. Dix skieurs locaux, qui n'avaient sans doute jamais mis les pieds sur des spatules, ont été formés à l'utilisation des peaux de phoque, des chaussures en coque et aux techniques de montée et de descente. L'opération, soutenue par des organismes internationaux, des équipementiers (Arc'teryx, Craft, Mammut...) et une manufacture horlogère, leur a permis de goûter aux joies du ski, le temps d'une course. "C'est très valorisant pour les jeunes, commente Nadjib Sirat, président de la Fédération afghane d'alpinisme. Cela montre que des choses sont possibles même si rien ne semble changer."
Du ski autrefois à Kaboul
L'Afghanistan n'a pas véritablement de culture ski. Pour la simple et bonne raison qu'il n'y a pas de stations. La pratique existe cependant, introduite par les Occidentaux dans les années 1970. Le week-end, les diplomates avaient coutume de skier sur l'unique piste de Paghman, près de Kaboul. Des compétitions étaient organisées entre les clubs du ministère de l'Éducation et ceux de l'université de Kaboul. Depuis l'invasion soviétique de 1979 et la résistance qui en découla, la région est devenue un champ de mines. Dans la province relativement épargnée de Bamiyan, où les sommets culminent à plus de 5 000 mètres d'altitude, d'excellentes pistes de ski pourraient être aménagées, avec des hôtels et des magasins de location de matériel plus récent. Les skis bricolés en un tour de main par les charpentiers locaux enthousiastes, avec des planches de bois mort, quelques lanières de cuir pour les attaches et du métal enroulé sous la surface, risquent de vous envoyer tout schuss sur le carreau.
Pas d'eau chaude ni d'électricité
En 2008, la ville de Bamiyan a lancé un programme pour redynamiser le tourisme. Le projet d'un montant de 1,2 million de dollars est soutenu par la Fondation Aga Khan, spécialiste du tourisme durable dans les pays pauvres et la Nouvelle-Zélande qui veulent faire de la province un centre d'écotourisme autour des sites archéologiques et des sports de montagne. L'Afghan Ski Challenge s'inscrit dans cette dynamique. Cette année, la compétition était ouverte aux skieurs internationaux. Une Française, deux Suisses, un Américain et un Anglais ont fait le voyage. Les locaux ne payent pas les frais d'inscription. Le montant (500 dollars) est destiné à financer des projets éducatifs, touristiques et sportifs de cette région, dépourvue de réseau pour téléphones portables, avec de mauvaises installations médicales et des hébergements très rustiques, parfois sans eau chaude ni électricité. L'espoir de récupérer une partie de la prospérité passée n'est pas gagné. Skier au milieu des montagnes afghanes n'est pas sans risque. Les deux principales routes reliant Kaboul à Bamiyan, parsemées de mines et exposées aux attaques des talibans, ne sont pas sûres. La plupart des touristes prennent un vol des Nations unies pour rejoindre la province à l'ouest de la capitale. www.afghanskichallenge.com
Source : lepoint.fr
Par Nathalie Lamoureux
Kalil Reza est un champion. La semaine dernière, ce skieur afghan a remporté la deuxième édition de l'Afghan Ski Challenge. Il ne va pas aussi vite que l'icône de ski-d'alpinisme Kilian Jornet, triple vainqueur de la Pierra Menta, course de légende dans le Beaufortain. Et ne compte pas comme le franco-Espagnol 500 000 mètres de dénivelé dans les jambes. Mais, pour sa mère et pour tous les habitants du village, Kalil est bien plus qu'un numéro dans un classement, c'est un héros. L'évènement s'est déroulé dans une région durement éprouvée par la guerre : la vallée afghane de Bamiyan, au nord-ouest de Kaboul, célèbre pour ses statues de Bouddha géantes (55 m et 38 m), détruites par les talibans en 2001.
Bamiyan, attraction phare
Dans ce pays, rongée par la corruption et la guerre civile, la vallée de Bamiyan apparaît comme une région relativement tranquille. Nichée à 2 500 mètres d'altitude, elle est restée la principale attraction touristique du pays. Au pied des collines entourant la vallée, d'innombrables grottes forment un vaste ensemble de monastères, de chapelles et de sanctuaires bouddhistes datant du IIIe au Ve siècle. Dans un rayon de 70 km à l'ouest de la ville de Bamiyan, le Band-e Amir, un chapelet de lacs émeraude enchâssé dans les falaises, est une petite merveille. Malgré le charme de la vallée, les touristes ont déserté. Un peu moins de 2 500 bourlingueurs n'ayant pas froid aux yeux ont été recensés en 2009, dont 800 seulement étaient étrangers. En période de paix, cette vallée accueillait 150 000 visiteurs, venus du monde entier.
Ils n'avaient jamais mis les pieds sur des skis
L'hiver, grâce à une exposition nord et un climat très sec, la neige poudreuse y est excellente et garantit de belles courses vierges de traces. L'an dernier, une petite équipe, formée d'employés du journal Swiss Neue Zürcher Zeitung et de quelques skieurs afghans passionnés, a décidé de fonder le Bamiyan Ski Club et d'organiser une compétition de ski de randonnée. Dix skieurs locaux, qui n'avaient sans doute jamais mis les pieds sur des spatules, ont été formés à l'utilisation des peaux de phoque, des chaussures en coque et aux techniques de montée et de descente. L'opération, soutenue par des organismes internationaux, des équipementiers (Arc'teryx, Craft, Mammut...) et une manufacture horlogère, leur a permis de goûter aux joies du ski, le temps d'une course. "C'est très valorisant pour les jeunes, commente Nadjib Sirat, président de la Fédération afghane d'alpinisme. Cela montre que des choses sont possibles même si rien ne semble changer."
Du ski autrefois à Kaboul
L'Afghanistan n'a pas véritablement de culture ski. Pour la simple et bonne raison qu'il n'y a pas de stations. La pratique existe cependant, introduite par les Occidentaux dans les années 1970. Le week-end, les diplomates avaient coutume de skier sur l'unique piste de Paghman, près de Kaboul. Des compétitions étaient organisées entre les clubs du ministère de l'Éducation et ceux de l'université de Kaboul. Depuis l'invasion soviétique de 1979 et la résistance qui en découla, la région est devenue un champ de mines. Dans la province relativement épargnée de Bamiyan, où les sommets culminent à plus de 5 000 mètres d'altitude, d'excellentes pistes de ski pourraient être aménagées, avec des hôtels et des magasins de location de matériel plus récent. Les skis bricolés en un tour de main par les charpentiers locaux enthousiastes, avec des planches de bois mort, quelques lanières de cuir pour les attaches et du métal enroulé sous la surface, risquent de vous envoyer tout schuss sur le carreau.
Pas d'eau chaude ni d'électricité
En 2008, la ville de Bamiyan a lancé un programme pour redynamiser le tourisme. Le projet d'un montant de 1,2 million de dollars est soutenu par la Fondation Aga Khan, spécialiste du tourisme durable dans les pays pauvres et la Nouvelle-Zélande qui veulent faire de la province un centre d'écotourisme autour des sites archéologiques et des sports de montagne. L'Afghan Ski Challenge s'inscrit dans cette dynamique. Cette année, la compétition était ouverte aux skieurs internationaux. Une Française, deux Suisses, un Américain et un Anglais ont fait le voyage. Les locaux ne payent pas les frais d'inscription. Le montant (500 dollars) est destiné à financer des projets éducatifs, touristiques et sportifs de cette région, dépourvue de réseau pour téléphones portables, avec de mauvaises installations médicales et des hébergements très rustiques, parfois sans eau chaude ni électricité. L'espoir de récupérer une partie de la prospérité passée n'est pas gagné. Skier au milieu des montagnes afghanes n'est pas sans risque. Les deux principales routes reliant Kaboul à Bamiyan, parsemées de mines et exposées aux attaques des talibans, ne sont pas sûres. La plupart des touristes prennent un vol des Nations unies pour rejoindre la province à l'ouest de la capitale. www.afghanskichallenge.com
Source : lepoint.fr
inscrit le 16/02/05
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