Olivier Cotte, 39 ans, est un peu le tonton du freestyle français. Ancien bosseur de haut niveau, il organise le SFR Tour et couve les jeunes riders.
Olivier Cotte, 39 ans, est un peu le tonton du freestyle français. Ancien bosseur de haut niveau, il organise depuis 2001 son tour qui fut, au gré des annonceurs de la téléphonie : Siemens, Bouygues puis SFR Tour depuis 2007. En ouvrant un raccourci vers les XGames par l'intermédiaire de wild cards, son Tour a pris du tour de taille en attirant des riders étrangers. Alors que la première étape du SFR Tour 11/12 peine à démarrer pour cause de neige (on aura tout vu), nous avons discuté avec lui du freestyle passé, présent et futur. Que du bon.
-Tu es un ancien bosseur donc, tu as toujours tes deux genoux ?
-Oui (rires). A 12 ans je me suis orienté vers les bosses parce que je voulais faire ça depuis des années, il y avait un champion en Chartreuse, Philippe Bron, il revenait parfois dans sa station le week-end et je skiais avec lui, j'essayais de le suivre, c'était la star. La première année j'ai gagné le circuit régional toutes catégories, ensuite je suis entré en Equipe de France à 15 ans. Je suis resté dix ans en Equipe A pour arrêter à 25 ans parce que j'étais cassé de partout. Pendant ces 10 ans, j'ai gagné des Coupes du monde, une médaille aux Championnats du monde à Altenmark en 93 à l'âge de 20 ans, terminé 4ème aux JO à Lillehammer en 94 et ensuite j'ai enchainé les blessures : ligaments croisés, plusieurs fois le ligaments latéral et le ménisque, pété un rein. En 96, en tête de la Coupe du monde, je me casse un croisé. En 97, pour ma troisième course, je me casse la rotule en deux.
-Ensuite, tu es passé de l'autre côté en devenant entraineur.
-J'ai entrainé la section freestyle de La Plagne deux hivers avec Greg Guénet , on faisait de tout : big air, bosses, poudre. Ces minots de 12-14 ans (dont Arnaud Kugener, Kevin Philippe), ils ne voulaient faire que du new-freestyle et s'il existait des choses en snowboard, il n'y avait pas grand chose en ski. Du coup est venue l'idée de monter cette tournée structurée de freestyle : big air, slopestyle, half pipe, bosses, skicross appelée Le Siemens Freestyle Tour. On avait Baptiste Collomb-Patton, Laurent Favre, Arnaud Kugener, Flo Cuvillier, Seb Lounis tous les vieux quoi !
La plupart des riders ne portaient pas de casque et attachaient leurs dossards à leur ceinture. Ensuite j'ai enlevé le skicross et les Bosses dont la population n'était plus la même. C'était la seule tournée freestyle 100% française. Devenue le SFR Tour en 2007, elle s'est arrêtée un hiver, celui des premiers X Games Europe. Puis à Tignes, pendant les X Games de 2010, SFR m'a dit qu'ils voulaient reprendre la tournée qui collait à leur programme Jeunes Talents. L'objectif étant de pouvoir offrir des Wild Cards pour les X Games Europe et c'est comme ça que la tournée est repartie l'hiver suivant (l'hiver dernier donc, ndlr).
-Quels points communs tu peux voir entre les bosses de ton époque et le freestyle d'aujourd'hui ?
-C'est le même esprit. Ce ne sont plus les mêmes codes, les mêmes pratiques, mais avec du recul, les similitudes entre ces deux disciplines sont évidentes : naissance d'un nouveau sport créée par les jeunes, évolutions structurelles (introduction aux JO)... Quand on parle aux anciens bosseurs, il est évident que l'esprit est le même.
-Avec ton expérience fédérale, tu penses que les JO vont transformer le sport ?
-Non pour le pipe qui est un format relativement défini, qu'il soit olympique n'apportera qu'une visibilité supplémentaire et ne peut être que bénéfique. Pour le slopestyle, c'est différent... Les bosses olympiques ont été bloquées dans leur évolution par des réglementations FIS. L'inertie de la FIS ne permet pas des évolutions rapides des règles (et des formats) nécessaires à tous les sports alternatifs afin de rester en phase avec les pratiquants. Seulement l'avantage aujourd'hui est que la FIS s'entoure et demande conseil aux gens du milieu. Pour le moment, la FIS n'impose rien et s'informe, ce sont les gars du milieu qui donnent sportivement leur mot. Donc c'est plutôt bon signe. Soit la FIS continue comme cela, ce qui est bien, mais il y aura danger si cette grosse machine puissante gèle les règles et décide tout dans son coin. C'est ce que j'ai vécu dans les bosses.
-L'intégration de ton tour au classement AFP, comment ça s'est mis en place ?
-Les juges des X Games sont venus juger une étape du SFR Tour à la Plagne l'hiver dernier. Dans le lot, il y avait Steele Spence qui m'a envoyé ensuite un mail disant que ce serait bien que le tour soit référencé dans l'AFP. En septembre, Chris Schuster, responsable sportif des XGames qui bosse aussi à l'AFP me l'a confirmé.
-Comment négocie-t-on une wild card avec les X Games ?
-C'est SFR qui l'a introduite. L'opérateur étant partenaire des X Games, ça aide ! Mais j'ai dû les convaincre de la qualité sportive de l'événement et dû les rassurer sur le niveau des riders pour éviter qu'ils se retrouvent avec un gars qui n'est pas au niveau dans le pipe des XGames.
-Une wild card supplémentaire cette année : la formule leur a donc plu ?
-Oui. Markus Eder, Wingtaï Barrymore ont été qualifiés pour les XGames l'année dernière, je pense que ça va attirer beaucoup de monde cette année. Il y aura beaucoup plus d'étrangers, des Scandinaves dès la première étape à Val Thorens puis des Américains sur les étapes de pipe après les XGames en février.
-Les étrangers vont donc prendre les 4 wild cards ?
-Sportivement parlant, difficile de se prononcer... C'est bien pour l'event cette variété de nationalités, ça élève le niveau. Je ne suis pas chauvin mais j'aimerai vraiment cette année que des Français accèdent aux X Games avec nos wild cards, c'est l'origine du Tour.
-Il y a une différence de prize money entre filles et garçons, du simple au double, et pas de wild card pour les filles ?
-On a voulu des wild cards pour les deux, garçons et filles, ESPN nous a dit : "no way". C'était déjà chaud pour les garçons, mais pour les filles c'était tout de suite "non". Ils nous ont répondu que le niveau était insuffisant, et au vue de nos échanges il y a un an, nous n'avons même pas essayé de refaire la demande cette année. Il y a 7 ou 8 filles au départ des contests, la moitié peuvent prétendre à un podium, tu as donc une chance sur deux de prendre du prize money. Chez les garçons ils sont 80, donc sportivement c'est logique cette différence de prize-money, ça ne me choque pas. Ca n'a rien à voir avec le niveau de ski des filles.
-Il y a une nouvelle étape à Tignes ? Le pipe sera celui des X Games ?
-Normalement oui, ce sera le superpipe des X. L'idée était d'arriver à avoir une autre étape pipe pour proposer un classement général pipe.
-Quel est ton objectif avec cet évènement ?
-Continuer à le faire grossir, tout en conservant le côté frenchie et sa qualité sportive.
-Tu as besoin des sponsors extra-sportifs pour financer le ski ?
-C'est impossible autrement. Avant les fabricants mettaient beaucoup plus d'argent sur les événements. Aujourd'hui tu es obligé de fonctionner avec des extra-sportifs.
-L'European Open disparait, ça va jouer à ton avantage ?
-Je ne sais pas si c'est une bonne chose ou pas pour nous... Parfois les étrangers enchainaient les events, donc c'était bien qu'on soit plusieurs. Je ne suis pas persuadé qu'il y aura plus de monde chez moi à cause de la disparition de l'European Open. Ce n'est pas bon signe que des events s'arrêtent, cela peut dire que moins de marques s'y intéressent...
-Qui sont les riders français les plus prometteurs ?
-Antoine Adélisse. Dans 2 ou 3 ans, c'est un jeune qui peut cartonner très vite. Il a du potentiel, il est posé dans sa tête, il sait ou il veut aller. S'il n'a pas d'emmerdes, il n'y a pas de raison qu'il arrive à être le meilleur. Jules Bonnaire aussi.
-Comment vois-tu l'évolution du freestyle ?
-Quand je courais, j'avais des potes comme Mike Douglas, JF Cusson, j'ai entrainé de stages de bosses à Whistler avec Douglas. Sur le glacier, il y avait 7 camps de bosses les uns à côté des autres. C'était dingue ! Maintenant à Whistler tu as je ne sais pas combien de lignes de park. C'est beaucoup plus puissant aujourd'hui en terme de nombre de pratiquants, de rayonnement médiatique.
C'est bien qu'un sport se professionnalise, mais attention car il peut vite devenir très difficile, extrême. Il n'y aura alors plus qu'une petite élite capable de pratiquer le sport. C'est ce qui peut arriver en pipe, c'est ce qui est arrivé aux bosses.
Chaque génération revit la même chose, la même remise en cause des règles établies : freestyle dans les années 70, snowboard dans les années 80, freestyle new school dans les années 90. Que va inventer la nouvelle génération ?
4 Commentaires
Espérons juste que ca ne tura pas l'esprit freestyle.
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Merci pour tout Olive heureusement que des gars comme lui et Fabien Catanéo ont donné corps et âmes pour donné leurs chance aux petits jeunes et ont fait connaître le ski freestyle dans toutes les stations de ski françaises, le ski freestyle lui doit beaucoup!!!
Un vrai pilier du ski, j’ai jamais vue quelqu’un s’investir autant pour le sport!!!
big up!!!!
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Des jibs contests surement, vu l'évolution de la Jib dans ce sport ...
Regardez rien que dans les films et edits, dans tous il y a de la jib et un bon rider (freestyle hein :p ) est quelqu'un qui fait de la Jib (ex : nos amis les quebecois ) !
Il suffit de regarder maintenant le B&E show, combien sont les jeunes talentueux qui s'en inspirent !
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