Pourquoi ne pas skier sur les vagues après tout ? Ils sont plusieurs skieurs à s'être posé la question. La saga débute avec Chuck Patterson puis Willy Bogner à Jaws, continue avec Enak Gavaggio et Franck Bernes sur les vagues de la Nord à Hossegor (voir la vidéo) mais il faut toujours aller plus loin…
C’est la vague mythique de Belharra, au large de Guéthary (d'Urrugne, sont nuls en géographie ces skieurs) dans le pays basque qui remporte les suffrages cette fois-ci. Lorsqu'elle se réveille (ce qui n'arrive que très rarement), elle peut atteindre plus de 15 mètres de haut ! Néanmoins, dés que les conditions sont réunies; que la houle et la période des vagues l’accompagnant atteignent une certaine limite, que les coefficients de marée s’affolent, que le vent a la bonne orientation, les « chargeurs » (ndlr : surfeurs de grosses vagues) ne sont pas loin.
En ce mois de novembre 2018, faute de neige à se mettre sous les spatules, les skieurs ne sont pas loin non plus et les compteurs laissent présager un réveil imminent de la belle. Le trublion du freeride Franck Bernes scrute les prévisions météo tous les jours depuis la fin de l’été, tout comme le waterman multiple champion du monde de surf tandem et adepte du surf de gros, Rico Leroy. Tous deux sont sur le qui vive. Pierre Guyot, reparti préparer l’hiver du côté de la vallée des Belleville saute sur l'occasion et dans le premier avion pour rejoindre ses amis avec pour objectif de séduire lui aussi cette charmante dame.
Nous sommes le jeudi 8 novembre, une houle déjà très consistante aborde la côte landaise et c’est à Hossegor que se feront les derniers réglages avant le grand jour. Woodie Bouma accompagne Pierre Guyot, ce dernier fait aussi partie de ces glisseurs talentueux qui se sont lancés dans cette quête utopique de skier des vagues et amène une nouvelle paire de skis développée chez Bradley un autre shaper de surfs reconnu.
Le jet se met à l’eau et Pierre Guyot entame les débats. Une nouvelle expérience pour lui mais le skieur surdoué et surfeur émérite qu'il est ne laisse même pas de place au doute quant à sa familiarisation immédiate avec ses nouveaux skis dans cet environnement hostile. La marée monte vite et les conditions deviennent de plus en plus difficiles. Il pousse le vice peut être un peu trop loin, Rico Leroy prend alors tous les risques pour aller le récupérer avec son jet ski. Malgré son expérience, ils se font happer par une énorme série prés du bord. Le jet ski part en tonneau et finira sa course dans le sable, Pierre se débrouille pour enlever ses fixations et rejoint tant bien que mal le bord avec ses skis sous le bras dans des creux de 3m. Rico est déjà entrain de vérifier l’état de la machine, pas de casse, pas de blessés.
Nous voilà le jour J, Franck et Pierre prennent la direction du port d’Hendaye. Ils ne le montrent pas mais les deux compères sont sous tension, ils essayent de noyer le poisson sous couvert de quelques blagues : « Rico, t’es sur que t’as pas dérouillé le jet hier, il va pas nous lâcher ? », « T’as tenu combien sous l’eau déjà dans la baignoire hier soir ? »
Ils mettent la combi, les pompes de ski mais ils font pas trop les américains quand ils embarquent avec Guillaume Arrieta. Le photographe pilote le bateau accompagné de Paul Duvigneau, un surfeur shaper déjà initié à la vague géante et Stéphane Etcheto, un des pilotes de drone qui filme sur le WSL (ndlr : World Surf League).
La belle équipe sort du port escortée par Rico Leroy et son jet ski toujours opérationnel ! Après environ vingt minutes de bateau, ils aperçoivent quatre surfeurs au milieu de l’océan autour de deux autres motos des mers.
Il ne semble pas se passer grand chose quand soudain, au bout d’une dizaine de minutes, ils aperçoivent une première série de trois montagnes qui sortent de l’eau et qui dans un bruit assourdissant s’effondrent à seulement quelques dizaines de mètres de là.
Il n’y a plus de doute, notre amie est bien là et nous montre qu’elle est prête à composer avec ces quelques glisseurs venus tenter de l’apprivoiser.
Paul se met à l’eau avec son énorme gun. Et oui, c’est bien à la rame qu’il compte la dompter, ce qui semblait inconcevable il n’y a pas si longtemps ! « Adishatz les skieurs, je vais voir ce que ça dit dans la zone rouge !» s'exclame Paul. Dans le bateau, les chaussures sont bouclées et Franck chausse les lattes avant de prendre en main le palonnier et de se faire tracter jusqu’au pic. C’est à ce moment là que la patience et la concentration doivent prendre le pas sur l’excitation. Les tentatives s’enchainent mais les vagues sont rares, pas toujours surfables et ils ne sont pas seuls à l'eau…
Après prés de deux heures dans l’eau, la perspective d’un échec éventuel semble se dessiner. C’est à ce moment que Belharra décide d’envoyer deux de ses plus belles compositions de la journée et sans hésiter, Rico dépose Franck au sommet de la deuxième. Il ne reste plus qu’à tenir debout mais l’exercice s’apparente sensiblement à tirer une droite dans un champ de bosses, monnaie courante tout au long de l’hiver sur la neige…
Après un long ride, il sent la mousse flirter avec ses talons, la pente s’adoucir et soudainement s’éteindre. Le jet est là et le ramène vers le bateau en effervescence. « t’as eu la bombe de la journée, magique, dingue !» Les superlatifs s’enchainent atour de lui mais tout est allé très vite et Franck ne semble pas se rendre compte de ce qu'il s'est réellement passé.
Pas d'image de drone malheureusement, ce dernier a dû faire un arrêt au stand au mauvais moment pour changer ses batteries.
Une chose est sure, la marée monte et ils n’ont pas le temps de flâner. Une énorme série vient de passer et c’est au tour de Pierre de se mettre en selle après une attente interminable. Cependant, les conditions se détériorent rapidement et même s’il est déposé parfaitement sur les quelques vagues qui se présentent, elles manquent de consistance et ne creusent plus assez pour lui permettre de les chevaucher.
Il faut se rendre à l’évidence, la grande dame est passée furtivement et s’en est allée. Elle laisse néanmoins à l’équipe un goût d’inachevé mais par la même occasion un carton d’invitation à son prochain bal au cours duquel elle se dévoilera certainement un peu plus… et déjà séduits, nos amis répondront sans doute présent !
Aucun sentiment de frustration n’anime pourtant nos deux (plus très) jeunes amis qui savent s’enthousiasmer sans mesure de tout ce qui leur est offert de vivre, même s’ils ont pour désir de vouloir aller toujours plus loin…
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