Un park parfait dans un cadre idyllique, mais qui a demandé en amont, un boulot titanesque au responsable du shape, Arnaud Kugener. Dans des conditions nivologiques aussi difficiles, construire sept modules au laser sans l’aide d’une machine, avec seulement une petite équipe, ressemble plus à l’histoire de David contre Goliath, qu’au cliché paisible que certains se font du métier de shaper... Nous lui avons demandé de nous raconter la préparation de ce park :
« Je suis arrivé samedi dernier, on a cherché dimanche et lundi des endroits dans la station de Grandvalira. Tout était trop affecté par le vent, la pluie, les mauvaises conditions de neige. On s’est alors rabattu sur des faces hors du domaine. Les premiers jours, je n’étais pas du tout confiant car il n’y avait pas un enneigement énorme, il y avait beaucoup de cailloux dans les réceptions… Ce n’était pas évident de trouver des endroits assez cool pour que les gars ne se fassent pas mal et qu’ils puissent tout de même faire deux ou trois sauts.
J’ai shapé un jour tout seul, deux jours avec deux gars et un jour avec quatre gars. J’ai profité durant deux jours de l’hélico pour venir bosser sinon les autres jours, je venais en ski de rando…
On n’a pas fait de gros modules car la neige ne le permettait pas. Il n’y avait pas de poudreuse, on savait qu’on n’allait pas avoir de neige fraîche, alors, on a essayé de sauver le truc. On a fait en sorte que tout le monde s’amuse et surtout qu’il n’y ait pas de blessé. »
À ce moment là de l’interview, le capitaine de la team américaine, Sage Cattabriga, intervient et s’exprime au sujet d’Arnaud Kugener :
« Ce mec ! Ce mec ! Il a construit tellement de kicks ! Nous sommes tellement chanceux d’avoir eu tous ces sauts, c’était un plaisir ! Il a construit tous ces kickers avec des conditions si particulières, si difficiles... C’est un boulot extrêmement dur qu’il a réalisé là ! Alors merci beaucoup ! »
Il aura fallu attendre 15h pour que le premier rider s’élance. En effet, un léger voile empêchait jusque-là le manteau neigeux de décailler mais riders et organisateurs ont eu raison d’être patients car en milieu d’après-midi, le soleil est arrivé, la neige a ramolli et les riders ont pu enfin envoyer les tricks dont ils ont le secret.
Le vainqueur du FWT 2014, Loïc Collomb-Patton, ouvre le bal de la même manière que lors de la première journée, et s’impose face à Sage Cattabriga. Le français propose : Cork 5, 3.6, 3.6, 1.8… Le capitaine américain part sur le gros kicker, s’envole avec un très gros 3.6 mais rien n’y fait, le run de Loïc est au-dessus ! L’Europe débute comme samedi dernier en gagnant sa première confrontation.
Le deuxième run européen est aussi solide que le premier, le skieur de Chamonix, Sam Favret se retrouve opposé au talentueux, Parker White. Malgré un 900 de l’américain, Sam Favret est plus fort, il enchaine avec fluidité : 5.4, 1.8, Switch Cork 5.
Nick Mc Nutt va réduire l’avantage avec un run très stylé : 7.2, truckdriver, 3.6, nose butter 5 ! Bene Mayr ne peut rien faire, premier point américain.
Comme lors de la première journée, un face à face opposait Seth Morrison à Sam Anthamatten. Le quadragénaire part en premier, fonce sur le gros kicker et envoie, vous vous en doutez déjà… Un énorme backflip ! Il poursuit son run avec un lincoln et un 360. L’américain l’emporte malgré un beau run du Suisse dont un très gros backflip !
Les américains reprennent confiance et remportent les deux runs suivants avec Pehota et Durtschi. Américas 4, Europe 2. Mais Markus Eder et Mathieu Bijasson font faire le job pour revenir à égalité à la fin de cette première manche.
À la mi-temps, le score est de quatre partout. L’Europe conserve ainsi sa légère avance de la première journée : 9 à 7 (les points s’additionnent à la fin des deux manches).
Il ne reste qu’une manche. Que va-t-il se passer ? L’Europe va-t-elle s’offrir un quatrième titre dans l’histoire de cette Skiers Cup où l’Amérique va-t-elle revenir à égalité ?
Dès le début de cette seconde partie, le train bleu va redoubler d’effort, l’autrichien Fabio Studer va offrir le premier point de cette deuxième manche, avant que Sam Anthamatten effectue une véritable démonstration de force. Le suisse propose alors un run magnifique : Cork 7, Back, 3.6, Flair… Meilleur skieur, lors de la première journée, il propose ici, encore, l’un des plus beaux runs du jour. Nous lui avons demandé quel était le secret de sa grande polyvalence, et la réponse était simple : le plaisir !
« Moi, j’aime tout ! J’aime juste aller dehors et skier. Si demain, je vais monter un couloir ou marcher, j’ai le même plaisir. De plus, je peux vivre de cela, c’est quelque chose d’exceptionnel. Enfin, je pense que les meilleurs skieurs sont les skieurs qui sont polyvalents… »
Au cinquième "heat" de cette deuxième partie, l’Europe à la possibilité de terminer le match directement ! Tout repose sur Loïc Collomb-Patton… Il s’élance sur le premier module : hand drag cork 7 ! C’est très certainement, l’un des tricks les plus fous du jour. Le skieur de la Clusaz termine son run en beauté grâce à deux gros 3.6. Face à lui, le jeune Logan Pehota. Ce dernier n’a pas le choix, il doit vraiment attaquer, s’il ne veut pas faire perdre son équipe. Le canadien débute fort avec un premier 7.2, il retente ce trick une deuxième fois, malheureusement, il réceptionne mal… C’est terminé ! L’Europe est désormais certaine de remporter la Skiers Cup 2016.
En modèle, le capitaine européen a fait un sans faute durant cette compétition. Il remporte ainsi ses quatre rounds (sur quatre). Nous lui avons posé quelques questions :
- Comment s’est déroulée cette Skiers Cup en tant que capitaine d'équipe (NDLR : Richard Permin devait être le capitaine de la team Europe, ce dernier s’est blessé au dernier moment. Loïc Collomb-Patton a été désigné comme capitaine remplaçant.) ?
- Premièrement, je suis hyper déçu pour Richard qui n’a pas pu être présent, il se serait fait plaisir autant que nous. Je lui souhaite de revenir très vite et de prendre le poste de capitaine l’année prochaine.
La Skiers Cup est un événement complètement hors du commun. Le but est prendre du plaisir avant tout, ici, on parle de plaisir avant de parler de compétition. Les riders choisissent vraiment ce qu’ils veulent faire. Là, on s’est posé beaucoup de questions sur les deux jours de compétition : « Est-ce que l’on court ? Est-ce que l’on ne court pas ? Est-ce que l’on fait juste des runs pour avoir des images ? » Finalement, cela s’est super bien passé, les conditions ont joué en notre faveur et puis, on s’est tous vraiment fait plaisir, autant aujourd’hui qu’avant-hier sur l’épreuve de Big Mountain. C’était vraiment deux journées extraordinaires !
- Comment as-tu trouvé le park aujourd’hui ?
- Par rapport au peu de neige qu’il y a actuellement, il y a vraiment eu du gros boulot de fait sur cette face de slopestyle backcountry. Je remercie le shaper, Arnaud Kugener, et tous les gens qui sont venus lui donner la main dans cette préparation. Face aux mauvaises conditions, ils ont vraiment fait du bon boulot, on a passé un bon moment. Tout le monde est vraiment super content et on sera tous heureux de revenir l’année prochaine !
Au final, grâce à Nicolas Vuignier et Bene Mayr, l’Europe l’emporte 19 à 13. Tanner Rainville gagne lui, le dernier point de cette Skiers Cup 2016 face à Sam Favret. Ce dernier ayant chuté à la réception d’un gros 900.
Malchanceux cette année, Richard Permin n’a pas pu participer à cette édition pour cause de blessure, en guise de consolation, les organisateurs lui ont déjà proposé les rennes de la team Europe 2017. Une proposition qu’il a d’ores et déjà acceptée, le français sera opposé au skieur de chez Level 1, Tanner Rainville.
Le mot de la fin revient au big boss du FWT, Nicolas Hale-Woods :
« Dans l’ensemble, j’ai trouvé cette Skiers Cup excellente parce qu’il y’a un super esprit des riders alors que les conditions étaient difficiles : même quand on est les meilleurs skieurs du monde, on peut avoir du plaisir dans des conditions moyennes ! Et ça, c’est une leçon pour tout le monde… »
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