Les remontées mécaniques nous ont nargué toute la saison dernière et nous avons passé la majeure partie de notre temps à monter. De belles traces en Z aux escaliers rectilignes, c’est toujours les muscles ischio-jambiers qui ont en fait les frais. Certes, les quadriceps ont été entretenus un minimum dans de grosses descentes poudreuses mais ce n’est pas le même sport que j’ai redécouvert cet hiver.
J’adore gravir des sommets à ski mais enchaîner des bennes, télésièges, téléskis dans le seul et unique but d’abattre du dénivelé est tout autant jouissif et sportif. Et puis, si on replonge dans les cours de physique, la vitesse du rider dépend essentiellement de l’inclinaison de la pente. C’est une autre discipline, il faut aussi des jambes affûtées pour tenir du premier siège jusqu’à la dernière benne. Et pourtant les journées sont exemptes de montées.
Dans les Pyrénées, la saison a démarré en fanfare avec des chutes dantesques puis s’est mise en mode végétatif avec 6 semaines sans chute significative. Heureusement, le mercure n’est pas vraiment monté et le manteau neigeux est resté conséquent à l’Ouest de la chaîne pyrénéenne. Nous n’avons pas été des plus à plaindre jusqu’à ce jour au vu des conditions extrêmement sèches dans les autres massifs sudistes. Un peu plus de « powderday » mais ce ne fût guère mieux dans les Alpes du Nord. Au final, les conditions auront été davantage profitable aux vacanciers qu'aux freeriders locaux.
L’ensemble de la haute montagne française a souffert du manque de chute de neige mais surtout du vent. Bon nombre d’itinéraires ne sont pas faisables ou alors pour Monsieur Bonhomme uniquement et dans un string de neige. Il ne fallait pas les louper les fenêtres et que ce soit pour du simple freeride de station ou un itinéraire mythique. Peu nombreuses, nous n’avons pas loupé les quelques journées d’exception sur le domaine skiable du Grand Tourmalet Pic du Midi. Attention, certaines images peuvent heurter la sensibilité des personnes absentes de ces fenêtres de bonheur.
Cette année, la Saint-Valentin a aussi servi les amoureux de la neige avec un épisode conséquent. Les sapins ont reperdu leur fierté sous de gros flocons. Enfin, le carrelage commençait à s’éloigner de nos carres. Les grosses spatules pouvaient enfin sortir prendre le frais. A nous les skis nautiques pour tracer toute la journée et défricher nos runs favoris. Souvent, il a fallu être patient pour que le soleil apparaisse. Mais dès le début d’après-midi, nous pouvions enfin lâcher les chevaux sur de belles pentes vierges. Mis à part la fracture d’un splitboard en carbon sur un sapin, c’est vraiment que du bonheur d’enchaîner les descentes et de poser son postérieur pour répéter.
Début mars, les affaires reprennent, environ 50 cm réparti en 3 chutes sur une semaine comblent les fidèles freerideurs du domaine skiable. Avec le rider Manu Bonniot, nous partons sur un itinéraire emblématique du Pic du Midi de Bigorre (2877 m). Ce dernier offre une variété d’itinéraires répartis sur les différentes faces du sommet. Quand on aime le ski de pente raide, le couloir des poubelles (5.1 ; E2 ; 50° max.) fait partie des incontournables.
De la neige fraîche au rendez-vous, nous partons avec Benjamin, Laurent, Tom et Paul Matharan, guide incontournable du secteur. Deux objectifs principaux pour le run : se faire plaisir et capturer de belles images ! Le couloir n’a pas été skié de la saison, la terrasse de l’observatoire est bondée, le spectacle est assuré pour les visiteurs.
Depuis le sommet et en partant à l’opposé du départ de « la Classique », un évident couloir Nord-Est, haut de plus de 1100m, dessine une ligne évidente et plongeante. La dernière installation de l'hyper belvédère sur la terrasse du sommet permet désormais de bien visualiser et d’apprécier les conditions de cette ligne de freeride se trouve juste sous nos pieds.
Avec une inclinaison moyenne de 40/45° et un passage à 50°, c’est clairement une descente engagée qui demande la plus haute vigilance et ne permet aucune erreur comme tout itinéraire de haute montagne. Ce couloir nécessite un bon enneigement et souvent, il ne peut être parcouru avant fin février/début mars. Il est impératif que le manteau neigeux soit bien stabilisé avant toute entreprise. Le printemps est une période idéale mais étant exposé au soleil, il est nécessaire de s’y engager au plus tôt le matin.
En ce début mars, l’enneigement n’est pas fou et nous contraint à quitter légèrement l’axe principal du couloir et faire une parallèle en passant quelques épaules. Certains passages, bien que courts, furent bien techniques car béton ou glace.. Ayant passé la dernière difficulté, la pente se couche et place aux derniers virages.
Peu après, nous débouchons sur des barres rocheuses qu’il faut contourner en traversant franchement vers la droite pour déclencher les derniers virages achevant la fin du couloir. Nous arrivons alors sur un grand replat qui permet d'admirer l’itinéraire parcouru ainsi que les autres descentes possibles sur cette face Nord-Est.
Désormais, il faut longer cette face sans s'attarder afin de rejoindre le Val d'Arize (1700m) par une grande traverse. Nous passons le cours d'eau par un petit pont en bois où il faut déchausser . La descente se finit en rive gauche jusqu'à atteindre une bergerie.
De cet endroit, c’est un grand plaisir de pouvoir admirer le Pic dans son ensemble, se remémorer les sensations vécues et visualiser les autres itinéraires tout aussi engagés.
Il faut désormais traverser un bois aéré et enchanteur lorsque les rayons du soleil le pénètrent. Bon, cette année c’était rando en chaussures de ski dans les feuilles.
Après ces 8 km de descente et presque 1700m de dénivelé, on retrouve la route menant à la station de La Mongie. Stop and go back !
Freeride en station ou pur itinéraire hors-piste, c’est quand même un sacré luxe de pouvoir skier les pentes de son choix sans souffrances au préalable. Une remontée mécanique arrivant au point culminant d'un sommet approchant les 2900m est aussi un luxe. A priori, Janvril est un peu en avance, les fermetures des stations risquent donc d’être intéressantes pour profiter encore de quelques remontées bénites.
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