Le PC a 25 ans

A lire : tdg.ch

Tribune de Genève disait:

Le PC fête ses vingt-cinq ans. Quand IBM changea le monde


Informatique - Le 12 août 1981, l’IBM 5150 est lancé sur le marché. La révolution était en marche.

élisabeth eckert dunning
Publié le 11 août 2006

Il était une fois un temps où les secrétaires tapaient à la machine, où les scientifiques utilisaient une règle à calcul et où les journalistes utilisaient des ciseaux et de la colle pour faire «copier-coller».

Oui, les petits enfants, il fut un temps – pas si lointain – où le commun des mortels ignorait tout de l'informatique, du téléchargement, de la musique en ligne et du téléphone portable. Sachez-le, demain le PC (pour personnal computer, en anglais) d'IBM va fêter ses vingt-cinq ans d'existence. Et le pire de l'histoire, c'est que le père de cette révolution planétaire ne sera même pas de la fête, puisqu'IBM a vendu, voici deux ans, sa division PC au Chinois Lenovo, parce qu'elle n'était plus rentable…

Apple dominait le marché

Mais qu'importe. La biographie de «l'IBM 5150» – que Time Magazine a déclaré «Man of the Year» en 1982 – demeurera sans doute l'une des plus marquantes du XXe siècle. Le 12 août 1981, en effet, le groupe américain fait paraître cette annonce dans le Wall Street Journal: «IBM Corporation lance aujourd'hui l'ordinateur le plus petit et le moins cher du monde, l'IBM Personnal Computer». Le monde et surtout les principaux concurrents du géant américain lèvent à peine les yeux. En ce temps-là, Apple, Commodore ou Tandy dominaient le minuscule marché de l'ordinateur domestique, IBM se concentrant surtout sur les mégamachines à 9 millions de dollars qui envahissaient une salle entière et requéraient les services d'une soixantaine de personnes pour sa maintenance.

Sentant toutefois un développement possible dans ce secteur, la direction d'IBM engage alors deux génies de la miniaturisation, David Bradley et Don Estridge, qui décédera tragiquement le 2 août 1985 dans un accident d'avion. En 1981, ils vont donner naissance au premier PC du groupe, dont le prix d'appel a été fixé à 1565 dollars (3500 dollars d'aujourd'hui) et dont la puissance atteignait fièrement les 16 kilobytes, alors que, désormais, le moindre PC frise les 512 mégabits (soit 50 000 fois plus). En moins d'une année – et grâce à une campagne marketing exceptionnelle – IBM va vendre 1 million de ses PC, alors qu'elle n'espérait en écouler que 241 000.

Sans l'IBM 5150, point d'Internet

Il faut dire que le groupe ne croyait pas fondamentalement à ce succès. Pour preuve: pour la première fois de son histoire, IBM fit appel à des intervenants extérieurs pour la fabrication des microprocesseurs et le développement des logiciels. Intel et Microsoft sont aujourd'hui les deux gagnants de l'aventure du «5150» (lire ci-contre). Et ce qui fut sans doute une erreur commerciale de la part d'IBM – son option d'architecture ouverte qui fut très rapidement copiée par les autres acteurs du secteur – a tout simplement signifié la victoire de l'informatique accessible à tous. «IBM n'a sans doute pas inventé l'Internet, affirme aujourd'hui David Bradley. Mais elle a posé les conditions préalables pour que l'Internet soit désormais ce qu'il est.»
Microsoft et Intel flambent

Peut-être par crainte de devoir investir trop massivement dans un produit hasardeux et très certainement parce qu'IBM a décidé le développement et la mise sur le marché de son PC en moins de douze mois: toujours est-il que ses pères ont, en 1981, fait appel à deux nains, qui dominent aujourd'hui le monde. Le premier d'entre eux s'appelle Intel – alors une start-up spécialisée dans les microprocesseurs, les «moteurs» d'un ordinateur – qui fournira à IBM le cerveau de sa nouvelle machine.

Le second nain, Microsoft, était à peine né et son patron, un jeune étudiant de 25 ans du nom de Bill Gates, développera pour «Big Blue» (comme on surnommait en son temps IBM) le système d'exploitation MS DOS 0.1. Or, outre cette externalisation absolument exceptionnelle de la part d'IBM, ses dirigeants ont décidé de rendre publics et accessibles à qui le voudra tant ses microprocesseurs que les logiciels utilisés. Compaq, Dell ou HP vont s'engouffrer dans la brèche, donnant naissance à une industrie informatique indépendante. Intel et Microsoft n'ont plus eu qu'à empocher les dividendes, devenant les firmes informatiques les plus puissantes du monde. IBM avait lâché la proie pour l'ombre.
(ee)
En chiffres


* «L'IBM 5150» possédait une mémoire 16 kilobytes, c'est-à-dire une puissance 50 000 fois inférieure à celle d'un PC contemporain.
* Il faut en effet 1024 kilobytes pour faire un mégabit. Or, désormais, la puissance moyenne d'un ordinateur personnel est de… 512 mégabits.
* Au tournant des années 80, Apple, avec son Apple II, dominait le marché des PC. Son chiffre d'affaires atteignait en 1981 les 300 millions de dollars.
* Aujourd'hui, la valorisation boursière de toutes les entreprises informatiques atteint les 500 milliards de dollars.
* Avec l'offensive d'IBM, Apple – qui avait opté pour une architecture fermée – a failli mourir et Commodore-Tandy fait partie des livres de souvenirs.
* Parallèlement au 5150, IBM a créé une nouvelle catégorie d'ordinateurs, les «compatibles», c'est-à-dire pouvant fonctionner en réseau avec son PC. Petit à petit, le 5150 a remplacé, dans les bureaux, les terminaux reliés à un ordinateur central. (ee)