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Interview Karina Hollekim

Après son accident en 2006, Karina Hollekim a abandonné ski freeride, base jump et wing suit. Après 16 opérations, elle remonte sur les skis cet hiver.

article Ski

Février 2005. La Norvégienne Karina Hollekim est à Chamonix pour le tournage de Tangerine Dream (Teton Gravity). Elle s'élance pour un impressionnant saut de ski base au-dessus du glacier d'Argentière.
Février 2009. Karina est à Chamonix pour les Winter Goutdoor Games (où elle participe dans le film Focus) Elle boite, ses jambes reprennent vie après 24 fractures et 16 opérations. Les docteurs lui avaient prédit la chaise roulante, elle compte remonter sur des skis avant la fin de l'hiver.
Sa vie a basculé lors d'un saut de démonstration d'avion et la voilà clouée au sol, elle qui n'aimait que l'action, parcourir la terre en ski freeride, en base jump, en ski base. Cheveux blonds flamboyants, jambes jusqu’au menton, moue de mannequin, Karina était une femme hors-norme sur les skis et en l'air. Aujourd'hui, après son accident, elle est toujours hors-normes, mais pour d'autres raisons...


Trailer "20 Seconds of Joy"

-Comment as-tu vécu ton accident et ta réeducation ?
-J'utilisais mon corps dans tout ce que je faisais, j'étais dans les montagnes, je sautais en base jump, je ridais, et donc quand tu te retrouve coincée dans une chaise roulante pendant un an... Ca devait être plus long encore puisque les docteurs m'avaient dit que je ne pourrais pas remarcher.
Ce qui m'a vraiment aidé à continuer, ce sont tous mes amis, qui me soutenaient, qui sont venus me voir du monde entier, qui m'envoyaient des emails, qui m'ont fait comprendre que même si j'étais coincé au centre de réeducation ou à l'hôpital ils ne m'oubliaient pas. Je ne voulais pas les décevoir et ça m'a donné beaucoup d'énergie. Ca n'aurait pas été possible sans eux, alors quand quelqu'un est blessé, prenez soin d'eux !
J'ai du changer ma façon de voir les choses. Au début tu penses à tout ce que tu ne peux pas faire, ensuite je me suis concentrée sur tout ce que je pouvais faire. Les journées sont devenues positives, je pouvais peu à peu mettre mes chaussettes seule, ce qui fut une grande victoire. Me tenir debout et mettre un pied devant l'autre fut aussi dur que d'aller au sommet de l'Everest.

-Que voudrais tu dire aux autres sportifs "extrêmes" ?
-Nous qui faisons des sports extrêmes sommes conscients des risques et nous choisissons de les pratiquer quand même. Etre dans une chaise roulante, c'est le prix à payer. Je ne regretterai rien même si je devais rester incapable de marcher : j'ai expérimenté tant de choses, rencontré tant de gens, partagé des moments intenses partout dans le monde, c'était une vie irréelle par rapport au monde normal. Je me sens chanceuse d'avoir vécu tout cela et si ça doit se terminer, alors ok. Je me dis que j'ai eu beaucoup de chance, je m'en sors debout, d'autres à qui c'est arrivé ne sont plus là. Je voyage dans le monde, je suis bien !

-Qu'est-ce qui te manque le plus ?
-Ce n'est pas le saut de base jump en lui-même mais le petit sentiment de peur sur la montagne, le rire nerveux juste avant de sauter, la marche à pied pour atteindre le sommet, au lever de soleil, ce moment parfaitement calme.

-Tu racontes ton expérience dans des conférences, c'est un peu ton nouveau métier ?
-Oui (rires), d'ailleurs demain je fais un discours en Norvège. C'est venu de quelqu'un qui avait lu mon histoire dans le journal et m'a demandé de venir parler devant 1500 personnes à l'Opéra d'Oslo. J'ai dis "oui" sans réfléchir et quand j'ai raccroché le téléphone, je me suis dit :"qu'est ce que je viens de faire !". Je n'avais jamais écrit un discours et une heure seule sur scène, c'est long. Ca m'a forcé à me demander ce que je voulais partager avec ces gens, pas seulement une histoire mais donner à réfléchir. La plupart des gens ne connectent pas avec un sportif qui se jette de falaises de 1 000 m. Pourtant mon histoire est universelle, tout le monde peut perdre un proche demain ou avoir un accident. Il faut trouver la motivation de se remettre debout après un tel événement. Je dis aussi qu'il faut croire dans ses rêves et oser rêver. Petite, je voulais voler, c''était irréaliste et pourtant vingt ans plus tard, j'ai réussi. Il faut suivre son coeur, chercher ce que tu veux vraiment, ça te rendra heureux. C'est de cela dont je parle.

-Ca ne doit pas être facile pour toi de raconter encore et encore tes épreuves ?
-J'ai choisi d'être très honnête sur mon histoire, mon crash, cela peut être parfois effrayant car tu te mets à nu devant des étrangers.

-Tu vas donc remonter sur les skis ?
-Oui, je me vois vraiment reskier, mon plus gros challenge sera ma jambe, savoir ce qu'elle pourra supporter. J'ai perdu 12 cm de mon fémur, il est très fragile, il y a du métal, je suis une femme bionique (rires).

-Tu bippes dans les aéroports ?
-Oui !

-Et le base jump ? Tu te vois reprendre ?
-Je ne sais pas si j'en suis mentalement capable, j'ai peur maintenant, une peur plus irrationnelle, différente d'avant. Mais en allant mieux, je vais faire plus confiance à mon corps et peut-être que mes sentiments changeront dans un an, il ne faut jamais dire jamais ! J'ai fait tout ce que je voulais en base jumping, je suis satisfaite. Et puis j'ai toujours voulu pousser les limites, être une pionnière chez les filles, avec le ski base, la wing suit. Si je reviens, c'est pour être devant, je ne veux pas me contenter de sauter d'une montagne, je l'ai fait tant de fois...

-Les montagnes, en tout cas, tu veux y rester ?
-C'est ce qui me rend heureuse. Je ne voudrais pas en changer, c'est pour cela que je suis en train de déménager à Chamonix. Certains diront que je suis stupide car je ne peux pas skier et que je vais voir mes potes skier. Mais ça me rend tellement heureuse de me réveiller le matin avec les montagnes, et finalement être à la seule à ne pas skier sera une motivation pour remonter sur les planches. Je m'entraîne tous les jours pour cela, il faut que je retrouve les muscles que j'ai perdu et la flexion du genou.

-Que souhaiterais-tu amener au sport maintenant ?
-Même si je reviens dans le ski, je ne serai pas devant, mon corps n'est pas assez solide. Même si je m'entraînais très fort, je ne serai jamais à 100%. Mais pour une fille qui n'était pas censée remarcher, c'est pas mal de pouvoir remonter sur des skis ! Je dois apprendre à ajuster mes buts un peu plus bas, être heureuse et profiter de ce que je peux faire. Je ne dois pas me concentrer sur le coté extrême, mais sur la beauté, les sensations, communiquer à travers le ski, connecter à une audience plus large, pas uniquement à la communauté de l'extrême. Essayer de partager ce que je vois et ce que je ressens.
 
-Quand un skieur est blessé, il disparaît en général aussitôt des radars des médias, ce qui est plutôt cruel.
-Nous existons par la performance. Quand tu ne peux plus performer, tu es out. Pour moi ce ne fut pas le cas : j'ai gardé mes sponsors, ils m'ont aidé encore plus et cela signifie beaucoup pour moi, ça m'aide à vouloir revenir et donner ce que je peux.

-Que penses-tu des filles en freeride ?
-J'ai beaucoup aimé Rachel Burke aux Nissan Outdoor Games, elle skie comme un mec ! Elle fait partie de celles qui sortent du lot, comme Géraldine Fasnacht. Ce qui est positif c'est qu'il y a plus de filles qui participent à des compétitions, qui croient en elles.

-Tu te remets au ski en cette fin de saison alors ?
-Oui, juste glisser un peu, c'est pour cela que je suis ici, pour revenir sur la neige.

-Tu sais où ça se passera ?
-Oui, je sais exactement : ce sera au Tour, à Cham. J'en ai déjà rêvé plusieurs fois. Je me vois arriver en bas de la pente et... parfois je pleure, parfois pas. Mais à chaque fois je suis complètement heureuse.

Propos recueillis par Guillaume Desmurs
Photos du portfolio : RedBullPhotofiles
Portraits dans l'article : Aurélie Cottier



Histoire de montrer de quel métal cette blonde norvégienne est faite, voici un extrait d'interview, réalisée il y a quatre ans, où elle racontait son initiation au base-jump....
"J’ai rencontré un Américain qui était prêt à m’apprendre, c’était le premier qui m’inspirait confiance, j’avais eu envie avant mais n'avais trouvé personne. Il me dit : “viens aux States je t’apprendrai”. J’étais si motivée que quelques mois plus tard je l’ai appellé en disant : "j’arrive". Il n’en revenait pas, il ne pensait pas que je sauterai le pas. C’était comme un test. J’arrive donc, on commence le programme d'apprentissage d'un mois mais au second saut, il se casse une jambe. Il a quand même continué à m’apprendre, de sa voiture avec un talkie-walkie pour me donner le "ok you can go", et moi seule en haut de la face ! C’était dur, d'autant plus que pour les sauts de ponts qui sont interdits, nous devions sauter la nuit ! J’ai peur du noir, j’étais pétrifié là-haut, je ne lui ait pas dit ! J’étais seule pour vérifier mon matos, avec juste mon instinct et le peu que j’avais appris avec lui. Je revérifiais encore et encore. Je comptais 1, 2, 3, mes pieds tremblaient, je me disais que le meilleur moyen de redescendre, le plus rapide et le plus sûr, c'était en base. Je visais le petit chemin qu’il avait éclairé avec les light-sticks. Et voilà. Je me disais : mais qu’est-ce que je fais là ? Pourquoi est-ce que je m’inflige ça ? Je suis heureuse d’avoir commencé dans ces conditions, "the hard way", j’avais besoin de me faire confiance alors que normalement tu mets ta confiance entre les mains de quelqu'un d’autre. Aujourd’hui ça me sert. Les gars avec qui je saute n'ont pas besoin de s'occuper de moi, je n’ai besoin de personne, je suis autonome".

11 Commentaires

freeheel_rider Respect ! "Ne laisse jamais les autres te faire la place au doute, et quand tombera la pluie des rêves profites-en au goutte à goutte ..."
 

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TheBrain Sacrée minette ! J'ai toujours suivi ses vidéos avec passion. Très heureux de la voir de retour !!
Belle histoire et j'espère de tout coeur qu'elle rechaussera au Tour ! Quel courage quand même !

Merci encore pour ce superbe interview
 

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passemontagne j'ai eu la chance de rencontrer karina lors d'un week end avec north face et j'ai vraiment été bluffé par cette nana. super humble, gentille, elle est très calme, mais on sent qu'elle a une volonté de fer. elle avait pour objectif de reskier en mai ; je lui souhaite de tout coeur de réussir.
 

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niikoola Exemple à suivre ... Courage, humilité, enthousiasme et sens des responsabilités, cette fille résume assez bien l'esprit freeride.
 

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porcinee1017 Comme tout le monde le dit, respect. J'en avais les larmes aux yeux en lisant l'article... Je vis pour le sport aussi et comme elle, suis passionnee et ne suis bien qu'en montagne. Souvent on se dit "comment est-ce que je reagirais si je ne devais plus marcher, plus pouvoir faire tout ca, tout ce que j'aime..." Je crois qu'elle detient une tres bonne reponse ... Grattis, jag hoppas att jag träffa henne en gång ...
 

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